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Tournée en Asie du Sud-Est : au Vietnam, Emmanuel Macron présente la France comme une troisième voie

Le président français a entamé ce lundi 26 mai sa visite diplomatique sur le continent asiatique par le Vietnam, une région prise en étau entre les Etats-Unis et la Chine, affichant la France comme une alternative fiable. 9 milliards d’euros de contrats ont été signés entre les deux pays.

Pourquoi pas la France ? Emmanuel Macron a vanté les mérites du pays des droits de l’Homme comme une alternative fiable pour les pays d’Asie du Sud-Est, lors de sa tournée démarrée ce lundi 26 mai au Vietnam. Le président français a rappelé son engagement à un ordre mondial «fondé sur le droit» depuis le Vietnam, une région vulnérable à la montée des frictions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine.

Vision commune

Le chef d’Etat a évoqué les «grands déséquilibres» et «le retour de discours de puissances ou d’intimidations», qui imposent d’agir «ensemble» pour «préserver un ordre fondé sur le droit, condition sine qua non à la prospérité», devant son homologue vietnamien Luong Cuong. De fait, le dirigeant a présenté la France comme une alternative fiable au Vietnam, pris en tenaille entre Washington, qui menace d’imposer une surtaxe prohibitive sur les exportations vietnamiennes à destination du marché américain, et Pékin, son allié de longue date avec lequel Hanoï partage des différends territoriaux en mer de Chine méridionale.

Au Vietnam, cette posture de «puissance d’équilibre» peut trouver un écho : le pays veille lui-même à garder un certain équilibre dans ses relations avec la Chine et les Etats-Unis, afin de maximiser ses intérêts commerciaux, dans ce qu’il appelle sa «diplomatie du bambou».

Ces enjeux accompagneront Emmanuel Macron tout au long de sa visite en Asie du Sud-Est, avec des arrêts prévus en Indonésie et à Singapour cette semaine. Arrivé dimanche soir à Hanoï avec son épouse Brigitte Macron, le dirigeant a insisté sur la vision commune partagée avec le Vietnam, pays de 100 millions d’habitants à la croissance dynamique, qui partage un passé colonial souvent douloureux avec Paris.

Treize accords signés

Quelque treize accords ont été signés ce lundi, pour un montant de «9 milliards d’euros», a annoncé le président français depuis Hanoï. «Ce sont à l’occasion de cette visite d’Etat, 9 milliards d’euros de contrats qui sont signés et qui marquent, en matière de défense, d’aéronautique, de ferroviaire, le lien très fort qu’il y a entre nous», a déclaré Emmanuel Macron aux journalistes.

Ces contrats concernant également l’énergie nucléaire, un secteur crucial pour le pays asiatique dépendant des énergies fossiles et qui cherche à répondre aux besoins croissants de sa population, ainsi que dans les transports et les satellites. La compagnie low-cost Vietjet Air a aussi annoncé passer commande pour 20 avions gros-porteurs Airbus A330-900, qui s’ajoutent à un premier contrat similaire de 20 aéronefs passé l’an dernier avec le géant européen de l’aéronautique. «C’est bien une nouvelle page qui s’écrit entre nos deux pays […] Une volonté d’écrire une page encore plus ambitieuse de la relation entre le Vietnam et la France, entre l’Asean et l’Union européenne», a insisté Emmanuel Macron.

Après un hommage dans la matinée à la mémoire des combattants de la guerre d’Indochine qui se sont battus de 1946 à 1954 contre la France, pour l’indépendance, Emmanuel Macron a rencontré son homologue vietnamien Luong Cuong. Le chef de l’Etat, dont c’est la première visite au Vietnam, doit être reçu plus tard par le secrétaire général du Parti communiste To Lam, qu’il avait lui-même accueilli à Paris en octobre.

Répression massive contre la société civile

Le chef du parti, avec lequel il déjeunera au temple de la Littérature, monument dédié à Confucius et lieu emblématique de la culture vietnamienne, est considéré comme le dirigeant le plus puissant du pays, où les organisations de défense des droits dénoncent une répression accrue de toute voix critique du pouvoir.

Human Rights Watch a alerté Emmanuel Macron dans une lettre la semaine dernière, lui demandant de «faire pression» publiquement sur le gouvernement vietnamien pour qu’il «libère sans condition toutes les personnes détenues pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression, d’association, de religion et de réunion». Une telle interpellation n’est pas dans les usages du président français qui assure régulièrement préférer évoquer ces sujets sensibles à huis clos. D’autant qu’au Vietnam, l’Elysée espère «renforcer les coopérations dans les secteurs stratégiques tels que l’énergie, les transports et la défense».

Et le chef de l’Etat entend marteler son offre de «troisième voie» à ce pays d’Asie-Pacifique particulièrement exposé à la concurrence sino-américaine. «Le Vietnam est vraiment sur la première ligne de toutes les tensions qui croissent en mer de Chine méridionale», où Pékin se fait de plus en plus offensif dans ses revendications territoriales, glisse un haut responsable de la diplomatie française. Mais il est aussi en pleines négociations pour tenter d’échapper à la forte taxe douanière de 46 % imposée puis suspendue par Donald Trump, alors que les Etats-Unis sont le plus grand marché des exportations de l’industrie manufacturière vietnamienne.

Messages subliminaux

Enoncée dès 2018, déjà vantée dans de multiples déplacements en Inde, dans l’océan Pacifique ou dans l’océan Indien, la «stratégie indo-pacifique» d’Emmanuel Macron consiste à proposer une troisième voie aux pays de la région. Et elle trouve selon Paris toute sa pertinence depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche avec ses menaces de guerre commerciale.

De manière plus ou moins subliminale, le président français devrait avoir un message pour chacun. Pour le président américain, en défendant les «règles du commerce international» plutôt que la loi de la «jungle», selon un de ses conseillers. Pour son homologue chinois Xi Jinping, qu’il a appelé avant son départ à garantir une «concurrence équitable», en martelant que la France est un partenaire «respectueux» de «la souveraineté» des pays de la région.

Et aussi pour le président russe Vladimir Poutine, en affirmant aux pays comme le Vietnam ou l’Indonésie, longtemps tournés vers Moscou notamment pour leurs armements, mais qui cherchent à diversifier leurs fournisseurs, que la Russie, par la guerre qu’elle mène en Ukraine avec le soutien de soldats nord-coréens, «déstabilise l’Asie» et non seulement l’Europe.

Libération avec Agence France Presse – 27 mai 2025


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