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Drogues synthétiques : la Thaïlande confrontée à l’explosion du trafic en Asie du Sud-Est

Le dernier rapport de l’ONUDC, publié en mai 2025, dresse un constat alarmant : les drogues synthétiques, en particulier la méthamphétamine, inondent la région Asie de l’Est et du Sud-Est.

En ligne de front, la Thaïlande voit ses saisies exploser et ses vulnérabilités internes s’aggraver. Entre routes de trafic régionales, connexions internationales et réponse nationale, l’année 2025 a marqué un tournant dans la lutte contre les drogues synthétiques en Asie du Sud-Est. 

L’ONUDC face aux défis de la crise régionale

Chaque année, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) publie une analyse régionale sur les drogues de synthèse dans l’est et le sud-est asiatique. Ce rapport s’appuie sur les saisies, les tendances de consommation, les prix au marché noir ainsi que les contributions directes des autorités locales. 

L’édition 2025 indique que la production et le trafic de drogues synthétiques explosent, dopés par une offre de plus en plus sophistiquée, bon marché et transnationale. L’enjeu est d’autant plus grave que les drogues en question, méthamphétamine, kétamine, ecstasy et parfois même des opioïdes de synthèse, présentent des risques sanitaires massifs. En effet, elles provoquent une forte addiction, des troubles psychotiques, des dépressions, des surdoses et des risques cardiovasculaires. L’ONUDC rappelle que la pureté reste élevée malgré l’abondance, ce qui augmente directement la dangerosité de ces produits. 

L’Asie du Sud-Est submergée par les drogues de synthèses 

“Cette quantité saisie ne représente qu’une partie du total circulant réellement sur les marchés. Le volume réel est bien supérieur”, a alerté Benedikt Hofmann, analyste de l’ONUDC, lors d’une conférence de presse à Bangkok. * La disponibilité accrue, couplée à la baisse des prix, rend les drogues synthétiques particulièrement accessibles, y compris pour les populations les plus vulnérables. 

Un autre élément préoccupant est la diffusion géographique du trafic. Des routes maritimes émergent, en particulier au départ de la Malaisie vers l’Indonésie, les Philippines et même les îles du Pacifique. Sur terre, de nouveaux corridors s’ouvrent via le Laos et le Cambodge, rendant les efforts de contrôle plus complexes. 

Le cas singulier de la Thaïlande 

La Thaïlande est l’épicentre de cette crise régionale. Elle a saisi plus de 130 tonnes de méthamphétamine en 2024, franchissant pour la première fois la barre symbolique des 100 tonnes. Cela inclut à la fois des cristaux (ice) et plus d’un milliard de comprimés de yaba interceptés.

Les autorités locales expliquent que le pays agit à la fois comme une zone de transit, en lien direct avec les laboratoires situés dans l’Etat shan du Myanmar, et comme marché de consommation croissant. Lors de la conférence de presse, Sritrakool Wacladee de l’ONCB (Office national de contrôle des stupéfiants en Thaïlande), alerte sur le faible coût du Ya ba, une des drogues les plus utilisées en Thaïlande.

La Thaïlande est donc au cœur d’un réseau transnational. Les drogues synthétiques produites au Myanmar transitent massivement par le nord et l’est du pays avant de prendre plusieurs voies vers : 

  • Le Cambodge et le Vietnam (corridor terrestre) 
  • La Malaisie et Singapour (trafic routier et maritime) 
  • Les Philippines et l’Indonésie (via le port de Sabah)

La flexibilité des groupes criminels est notable. Ils changent de routes, utilisent des cryptomonnaies, et délocalisent les laboratoires pour éviter les saisies. Hofmann souligne que la pression policière aurait dû finir par freiner la production, mais les volumes ne cessent d’augmenter. 

L’urgence d’une coordination régionale

Face à l’ampleur de ce phénomène, la Thaïlande a intensifié sa coopération régionale. Elle est un membre actif du programme Global SMART de l’ONUDC et collabore avec le Mémorandum d’entente du Mékong (MOU) qui regroupe six pays tels que le Cambodge, le Vietnam ou encore le Myanmar qui ont tous affirmé vouloir faire des efforts supplémentaires dans la lutte contre la production, le trafic et l’usage de drogue. Cela passe par une harmonisation des saisies, un échange des données concernant les laboratoires et des opérations conjointes. 

Cependant, le rapport indique que malgré l’augmentation des saisies, la production ne recule pas, les prix demeurent bas et les groupes criminels s’adaptent rapidement. L’ONUDC appelle ainsi à un équilibre entre répression et prévention sanitaire. 

Une réponse entre répression et prévention

La Thaïlande est donc à la fois une route logistique, une zone de consommation croissante et un acteur central dans la coopération internationale. Pour autant, le bilan reste contrasté. Les discours publics insistent sur la coopération, mais les réalités locales sont marquées par des inégalités, des manques de moyens et des tensions avec les populations locales touchées par le fléau des addictions. L’ONUDC rappelle une évidence, cette crise n’est pas qu’une affaire de frontières et de douanes. C’est avant tout une crise sociale, sanitaire et politique et il s’agit désormais de protéger véritablement les citoyens, d’allier solidarité régionale et prévention, et de concevoir une réponse adaptée. 

Par Nesrine Boulakhlas – Thailande-fr.com – 10 août 2025

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