Infos Thailande

Nouveau Premier ministre en Thaïlande, tensions persistantes à la frontière avec le Cambodge

Le magnat conservateur Anutin Charnvirakul a pris ses fonctions comme Premier ministre de la Thaïlande dimanche. L’économie et le conflit frontalier seront ses priorités, alors que des milliers de Cambodgiens sont expulsés de leurs terres ou de leur lieu de travail.

Le différend frontalier qui persiste entre la Thaïlande et le Cambodge sera l’une des priorités du nouveau Premier ministre thaïlandais : Anutin Charnvirakul, héritier d’un grand groupe de BTP, a pris ses fonctions hier, rapportent la radio Thai PBS et le quotidien thaïlandais The Nation. Le nouveau chef du gouvernement promet de ne faire perdre aucun cm carré au territoire thaïlandais, alors que des tensions à la frontière avec le Cambodge, ont provoqué, cet été, la mort de 40 personnes et la fuite de plus de 300 000 autres, rappelle la BBC. « Une guerre frontalière insensée » selon The Economist, « dans une zone parsemée de temples hindous construits sur des falaises abruptes il y a près de mille ans. »

Des Cambodgiens repoussés par des fils barbelés : des fils barbelés traversent, aujourd’hui, le village cambodgien de Chouk Chey et ses plantations de canne à sucre et « au-delà de la frontière, de grands panneaux noirs s’élèvent du sol, dissimulant les soldats thaïlandais qui les ont installés. C’est la nouvelle frontière infranchissable entre les deux pays, qui était autrefois ouverte », décrit la BBC, qui a pu se rendre aux confins de la Thaïlande et du Cambodge, et notamment à Chouk Chey, dans une province du nord-ouest du Cambodge. Tout a changé le 13 août dernier, « à 15h20, heure locale », précise la BBC : « les soldats thaïlandais sont arrivés et nous ont demandé de partir, puis ils ont déroulé les barbelés », se souvient une Cambodgienne. « J’ai demandé si je pouvais retourner chercher mes casseroles. Ils m’ont seulement accordé 20 minutes ». Elle fait partie des familles « qui ont été coupées de leurs maisons et de leurs champs situés de l’autre côté des fils barbelés où elles affirment vivre et travailler depuis des décennies », poursuit la BBC. « À Chouk Chey, la frontière devrait suivre une ligne droite entre deux bornes en pierre qui marquent la frontière, convenue il y a plus d’un siècle. »

La Thaïlande explique qu’elle ne fait que sécuriser son territoire, compte tenu de l’état actuel du conflit avec le Cambodge, indique la BBC. Le Bangkok Post convoque , lui, des « souvenirs amers de la frontière », « la peur de perdre des territoires toujours présente » dans l’esprit de villageois thaïlandais qui ont connu les incursions des Khmers rouges, depuis le Cambodge, à la fin des années 1970, « volant nourriture, bétail et tout ce qu’ils pouvaient transporter. Ils ont incendié un marché. Des gens ont été tués, d’autres blessés », raconte, encore traumatisée, une Thaïlandaise de 70 ans, au Bangkok Post. Elle était enceinte à l’époque. « Je me suis cachée, terrorisée, pendant que nos porcheries brûlaient. On n’oublie jamais quelque chose comme ça ». D’autres Thaïlandais se souviennent de l’afflux de réfugiés Cambodgiens, au début des années 1980. Puisque que « les tensions refont surface à la frontière, aujourd’hui, ces villageois de Ban Kruat [NDLR : dans le sud-est de la Thaïlande] se considèrent comme les gardiens de la frontière », écrit le Bangkok Post.

Coût humain et financier

Conséquences économiques : Dans le nord-ouest du Cambodge, à Chouk Chey, le gouverneur déplore, lui, les conséquences économiques des actions de la Thaïlande avec la fermeture de la frontière avec le Cambodge qui entraîne, « chaque jour, la perte d’un million de dollars en recettes douanières », rapporte la BBC. Situation d’autant plus épineuse que le Cambodge est plus pauvre que la Thaïlande, souligne le média public britannique. Sans compter « des centaines de milliers de travailleurs cambodgiens qui ont quitté la Thaïlande et les touristes thaïlandais qui ne se rendent plus au Cambodge. Le tout nouveau terminal de l’aéroport de Siem Reap, construit par la Chine, devant servir de porte d’entrée aux célèbres temples d’Angkor, est désert, notent le magazine en ligne The Diplomat et la BBC.

Des réfugiés coincés entre des sentiments nationalistes et une rhétorique guerrière : Des Cambodgiens, frustrés, laissent parfois éclater leur colère, comme jeudi dernier, dans la province de Sa Kaeo, dans le sud-est de la Thaïlande, rappelle la BBC. Ils étaient des centaines à bloquer une route pour protester contre leur expulsion par l’armée thaïlandaise, détaille la radio Thai PBS. Alors que « 5 000 familles cambodgiennes survivent sous les bâches d’un camp de réfugiés rudimentaire », que la BBC a pu visiter, « entourées de boue et avec le minimum d’installations sanitaires », du côté thaïlandais, tous les déplacés du conflit ont pu rentrer chez eux, le mois dernier. Le tout nouveau Premier ministre thaïlandais promet de veiller à ce différend frontalier : Anutin Charnvirakul qui a pris ses fonctions de Premier ministre, hier en Thaïlande, annonce vouloir « travailler d’arrache-pied dans les mois à venir, quitte à ne pas prendre de vacances ni de jour de repos », pour servir au mieux son pays, peut-on entendre dans une allocution retransmise par l’agence de presse AP. Une question reste en suspens : les dirigeants thaïlandais et cambodgiens, civils et militaires vont-ils tempérer leurs ardeurs nationalistes et leur rhétorique guerrière ?, se demande la BBC. Main tendue, en tout cas, à l’arrivée du Premier ministre thaïlandais : son homologue cambodgien l’a félicité et appelé à « un renouvellement des relations bilatérales » dans un geste salué aussi bien par le journal Khmer Times, au Cambodge, que par le Bangkok Post, en Thaïlande.

Par Catherine Duthu – Radio France Culture – 8 septembre 2025

En poursuivant la visite de ce site, vous acceptez l’utilisation de traceurs (cookies) vous permettant juste d'optimiser techniquement votre navigation. Plus d’informations

En poursuivant la visite de ce site, vous acceptez l’utilisation de traceurs (cookies) vous permettant d'optimiser techniquement votre navigation. Aucune information sur votre utilisation de ce site ne sera partagée auprès de quelconques médias sociaux, de sociétés commerciales ou d'agences de publicité et d'analyse. Cliquer sur le bouton "Accepter", équivaut à votre consentement.

Fermer