Infos Birmanie

Birmanie : sous couvert d’ouverture, la junte verrouille un peu plus la couverture médiatique des élections

Le régime militaire birman a annoncé que les médias – qu’il réprime pourtant sans relâche – seraient autorisés à couvrir les élections générales prévues à la fin de l’année. Sous couvert d’ouverture, la junte prépare en fait les conditions pour contrôler la couverture de ce scrutin, qu’ils ont déjà commencé à verrouiller. 

Une annonce qui a tout d’un vernis légal. La junte militaire au pouvoir en Birmanie, l’une des plus grandes prisons du monde pour les journalistes, a déclaré que les médias locaux et internationaux seraient “autorisés” à couvrir les élections générales, qui doivent se tenir entre décembre 2025 et janvier 2026.  

Cette prétendue autorisation de la part de l’un des prédateurs de la liberté de la presse 2025 s’accompagne de conditions strictes : les autorités militaires ont précisé que la couverture des élections ne serait pas autorisée sans l’obtention d’une accréditation officielle. Aussi, en juillet 2025, la junte a encore renforcé son arsenal répressif en adoptant une loi sur les interférences électorales, prévoyant de lourdes peines de prison pour quiconque diffuserait des informations visant à “perturber un aspect du processus électoral” – terminologie aux contours totalement flous. Le secrétaire du Conseil indépendant de la presse de Birmanie (IPCM), Toe Zaw Latt, a dénoncé une loi destinée à “intimider les journalistes et à les dissuader de critiquer ou de rendre compte librement [des élections]”.

Depuis le coup d’État de février 2021, la presse indépendante a quasiment disparu de Birmanie en raison de la répression violente des autorités. Une soixantaine de médias ont été contraints à l’exil, principalement en Thaïlande, selon les chiffres de RSF. À ce jour, 51 journalistes sont enfermés en raison de leur travail. La plupart des médias étrangers ont également quitté le pays : l’Agence France-Presse (AFP) est aujourd’hui la seule agence internationale à y maintenir un bureau. 

“En prétendant autoriser la couverture médiatique alors qu’elle réprime depuis plus de quatre ans les journalistes, la junte birmane révèle l’ampleur de son hypocrisie et de son cynisme. Personne n’est dupe : cette manœuvre ne cherche qu’à offrir un vernis de légitimité à de nouvelles restrictions. Si elle veut montrer un semblant d’ouverture, la junte doit libérer sans délai les 51 journalistes détenus, ouvrir réellement le pays à la presse internationale et mettre fin à sa politique de contrôle systématique des médias.

Cédric Alviani

Directeur du bureau Asie Pacifique de RSF

Les conditions des élections projetées par la junte ont été qualifiées de “frauduleuses” par le rapporteur spécial de l’ONU Tom Andrews ainsi que par de nombreux experts internationaux, en raison du manque d’indépendance de leur organisation et de la répression persistante de l’opposition. 

Depuis le coup d’État, la junte mène une répression d’une extrême brutalité contre les médias :

  • sept journalistes et défenseurs de la liberté de la presse ont été exécutés ;
  • plus de 200 journalistes ont été emprisonnés, dont au moins 51 sont, à ce jour, toujours derrière les barreaux ;
  • des journalistes dénonçant la répression du régime ont été systématiquement torturés – passages à tabac, violences sexuelles, privations de sommeil et de nourriture ;
  • les licences de 15 médias ont été arbitrairement révoquées, forçant leurs équipes à travailler dans la clandestinité et à affronter des risques accrus pour leur sécurité ;
  • les coupures d’Internet et de réseau ont empêché les journalistes de travailler ou de communiquer, créant des “trous noirs” de l’information dans certaines régions.

Myanmar Press Freedom Project : le soutien de RSF aux journalistes birmans

Face à cette répression, RSF a apporté une aide d’urgence à plus de 350 journalistes et pilote le Myanmar Press Freedom Project, une initiative qui soutient à la fois les journalistes exilés – estimés à environ 300 rien qu’en Thaïlande – et ceux qui continuent à travailler clandestinement à l’intérieur du pays.

La Birmanie est classée 169e sur 180 pays et territoires dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2025. Le pays est la deuxième plus grande prison au monde pour la profession, juste derrière la Chine.

Reporters Sans Frontières (RSF) – 4 novembre 2025

En poursuivant la visite de ce site, vous acceptez l’utilisation de traceurs (cookies) vous permettant juste d'optimiser techniquement votre navigation. Plus d’informations

En poursuivant la visite de ce site, vous acceptez l’utilisation de traceurs (cookies) vous permettant d'optimiser techniquement votre navigation. Aucune information sur votre utilisation de ce site ne sera partagée auprès de quelconques médias sociaux, de sociétés commerciales ou d'agences de publicité et d'analyse. Cliquer sur le bouton "Accepter", équivaut à votre consentement.

Fermer