L’épave de Hôi An livre ses premiers secrets
Selon les premières observations, les experts estiment que le navire ancien découvert récemment au large de Tân Thành, quartier de Hôi An Tây, ville de Dà Nang (Centre), aurait sombré ou été abandonné plusieurs siècles avant 1905.
Le matin du 9 novembre dernier, Pham Phu Ngoc, directeur adjoint du Centre de conservation du patrimoine mondial de Hôi An, a indiqué que son unité collaborait avec les autorités compétentes de la ville de Dà Nang pour poursuivre les fouilles et déterminer les mesures de préservation de l’épave, récemment réapparue après le passage du typhon Kalmaegi.
Selon M. Ngoc, le navire avait été découvert pour la première fois en 2023. À la suite de la récente tempête, les vagues ont continué d’éroder la couche de sable, révélant plus nettement la structure du bateau. Cependant, la montée de la marée a de nouveau recouvert une grande partie de la coque.
Traces historiques autour du site de l’épave
Le Centre de conservation du patrimoine mondial de Hôi An précise que la première enquête, réalisée à la fin de l’année 2023, avait déjà mis au jour plusieurs vestiges importants. Le 26 décembre 2023, dans la zone de Thinh My, quartier de Hôi An Tây, les vagues avaient dégagé une partie de la coque en bois enfouie sous le sable. Celle-ci avait été découverte par les habitants qui en avaient aussitôt informé les autorités.
À cette époque, la partie visible du navire mesurait environ 16,15 m de long pour 4,7 m de large. Sur les poutres (ou membrures), on distinguait encore des trous ronds traversants, fixés par des chevilles et des clous en fer. Le bois, de grande taille et soigneusement travaillé, témoigne d’un haut niveau de savoir-faire dans la construction navale.
Les habitants locaux racontent qu’à l’emplacement où le navire a été découvert se trouvait autrefois une dune de sable élevée, bordant une route construite à l’époque coloniale française, bien à l’intérieur des terres par rapport au rivage actuel. Le terrain appartenait jadis au jardin de la famille de Trùm Du, qui y vivait à l’époque coloniale. En raison de la forte érosion côtière, les habitants ont dû déplacer leurs maisons plus loin à l’intérieur.
Selon plusieurs témoins, lorsque la marée se retire, on peut encore apercevoir des traces d’anciennes fondations et des fragments de chaux, signes de l’existence passée d’une zone habitée. Ces dernières années, la mer a également mis au jour de nombreux fragments de céramiques chinoises des XVIIIe et XIXe siècles – bols, coupes, plats -, renforçant l’hypothèse que le secteur fut jadis un ancien lieu d’échanges commerciaux.
Lors des campagnes de fouilles, la plus grande partie de la coque demeurait enfouie sous le sable. L’équipe archéologique a dû recourir à des instruments spécialisés pour localiser précisément le navire et prélever des échantillons de bois destinés à l’analyse.
Préserver le patrimoine culturel subaquatique
Les résultats de l’étude topographique, comparés à d’anciennes cartes, ont montré que la position du bateau correspond à une dune côtière figurant clairement sur la carte de Tourane de 1905. La route côtière représentée sur ce document aurait été construite au plus tard à la fin du XIXe siècle, fournissant ainsi un repère temporel précieux pour dater l’épave.
Selon les experts, en 1905, l’emplacement du navire se situait à environ 700 à 800 mètres du rivage, ce qui signifie qu’au moment où il a sombré ou été abandonné, le niveau de la mer n’avait pas encore atteint la zone actuelle. Ainsi, le navire aurait été enseveli plusieurs siècles avant 1905.
Les résultats d’expertise des échantillons de bois indiquent que les poutres ont été taillées dans du bois de Lagerstroemia ; les bordés proviennent de bois de Hopea ; le pont et les cloisons sont en bois de pin.
D’après la nature de ces essences, les spécialistes estiment que le navire a probablement été construit dans la région du Sud de l’Indochine, où ces matériaux étaient abondants.
La structure du bateau révèle une combinaison de techniques de construction navale tradi-tionnelles d’Asie du Sud-Est et de Chine : une coque fortement cintrée, des planches jointes solidement par des chevilles de fer, et de grandes membrures robustes. Ces éléments cons-tituent des indicateurs essentiels pour déterminer la datation et l’origine culturelle du navire.
Selon le Centre de conservation du patrimoine mondial de Hôi An, l’épave de Tân Thành représente un patrimoine culturel subaquatique d’une grande valeur, susceptible d’apporter un éclairage précieux sur les échanges commerciaux et maritimes anciens dans le Centre du Vietnam.
Les experts soulignent qu’une fouille archéologique à grande échelle et une recherche interdisciplinaire – associant archéologues, spécialistes de la conservation, océanographes et historiens – seront nécessaires pour déterminer avec précision l’âge, l’origine, la structure, la technique et la fonction de ce navire historique.
Outre les fouilles, les travaux de conservation et de valorisation postérieures revêtent une importance capitale. Le Centre de conservation du patrimoine mondial de Hôi An recommande l’élaboration d’un plan de gestion et de présentation approprié, afin d’éviter que le site ne subisse de nouvelles dégradations dues aux vagues et aux intempéries.
Selon Pham Phu Ngoc, directeur adjoint du centre, son unité collabore actuellement avec les autorités de Dà Nang pour proposer une stratégie globale de protection, de préservation de l’état actuel et d’intégration progressive du navire dans un programme de recherche à long terme.
La découverte et l’étude de cette épave ancienne au large de Tân Thành constituent non seulement une contribution précieuse à la recherche sur l’histoire maritime régionale, mais ouvrent également de nouvelles perspectives pour la conservation du patrimoine culturel suba-quatique au Vietnam – un domaine encore relativement récent, mais prometteur et porteur d’avenir.
Par Xuân Hoàng – Le courrier du Vietnam – 22 novembre 2025
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