Infos Birmanie

L’inflation explose en Birmanie

Pour le 18ème mois d’affilé, l’indice des prix à la consommation a augmenté en Birmanie, portant l’inflation sur les douze derniers mois à 9,09 % à la fin du mois de janvier 2020, selon l’Institut birman des statistiques (IBS).

En variation mensuelle, l’indice des prix a augmenté de 9,06% en janvier, à comparer à l’augmentation de 8,81 % en décembre 2019. Depuis 2012, l’IBS, un organisme équivalent à l’Insee français, collecte et publie des données sur les prix et sur la consommation des ménages à partir d’un panier moyen constitué à l’époque grâce à une étude liée à un questionnaire distribué à près de 33 000 foyers à travers tout le pays. L’IBS avait utilisé 438 biens ou services de références pour élaborer son indice des prix, distinguant au passage les produits alimentaires et non-alimentaires ce qui lui permet d’analyser séparément l’évolution des prix de l’alimentation ou des autres produits.

Et ce sont justement les produits alimentaires qui sont le plus durement touchés par l’inflation, leurs prix augmentant de manière continue depuis plusieurs mois. La crise du cours de l’oignon qui a fait causer bien des ménagères en étant une illustration récente. La distribution spatiale des augmentations est très inégalitaire, les produits alimentaires s’élevant de 4,5 % dans l’état de Kachin jusqu’à 15,6 % dans la région de Mandalay.

Une économie fragile et immature

En règle générale, l’un des problèmes majeurs de l’inflation est la perte de pouvoir d’achat liée à la dépréciation de la monnaie. Mais heureusement pour le gouvernement birman, les politiques monétaires liées au yuan chinois, au dollar étasunien ou à l’euro cherchent à maintenir le cours de leur devise au plus bas, rendant la dépréciation du kyat encore soutenable, au point même que son taux d’échange contre le dollar est en hausse, le cours du dollar en kyats étant en baisse régulière. Ce qui s’apparente aussi à une des prophéties autoréalisatrices chères à Robert K. Merton, ces prédictions dont le seul énoncé s’il est cru engendre la réalité à travers les mesures prises pour éviter qu’elles n’adviennent ! L’agence Fitch prédisait fin août 2019 une forte dévaluation du kyat qui a semble-t-il entraîné des mesures de correction par anticipation qui ont abouti… à sa surévaluation actuelle qui n’est pas en ligne avec la forte inflation. Un risque majeur réside dans une hausse des taux directeurs des différentes grandes banques centrales de la planète (Etats-Unis, Zone euro) pour revaloriser leur devise. Mais pour l’instant, la tendance est inverse, à cause de la crise du coronavirus et il est donc probable que l’inflation birmane galope encore quelques mois.

Tout cela traduit les dangers d’une économie immature qui se cherche encore et demeure très fragile. Ce que plusieurs rapports de grandes institutions financières et économiques – Banque mondiale, Fonds monétaire international… – reconnaissent à demi-mot en parlant d’un réel potentiel mais d’une instabilité structurelle due aux reformes nécessaires qui sont menées, mais trop lentement, et à la trop faible application des mesures prises dans le cadre de ces réformes. En gros, les lois et la réglementation changent dans le bon sens mais pas les acteurs économiques car ils ne modifient que peu ou pas leur comportement et ne tiennent pas ou peu compte du nouveau cadre réglementaire. Tout cela va se sentir puisque la croissance estimée fin 2019 pour l’année 2020 s’élevait à 6,5%, qu’elle va être inférieure du fait de la contraction économique générée par l’épidémie de coronavirus et que ses effets pour la population seront rapidement gommés par une inflation à 9%.

Lepetitjournal.com – 10 mars 2020

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