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Au Cambodge le projet de loi sur l’état d’urgence critiqué par les ONG

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Amnesty International, Human Rights Watch et le CCHR demandent une révision urgente du projet de loi sur l’état d’urgence, qui permettrait selon eux de porter atteinte de manière injustifiée aux libertés fondamentales, notamment la liberté d’expression.

Dans le cadre de la pandémie de Covid-19 Le conseil des ministres cambodgien a approuvé mardi 31 mars un projet de loi sur l’état d’urgence. Selon plusieurs ONG de défense des droits de l’homme comme Amnesty International, Human Rights Watch et le Centre cambodgien pour les droits de l’homme (CCHR), cette loi permettrait au gouvernement de porter atteinte aux libertés fondamentales.

Le gouvernement cambodgien a annoncé que ce projet de loi a été élaboré conformément à l’article 22 de la constitution cambodgienne, selon lequel « quand la nation est en danger, le roi proclame publiquement l’état d’urgence après avis unanime du premier ministre, du président de l’Assemblée nationale et du président du Sénat ». Jusqu’ici, aucun texte de loi ne régissait l’état d’urgence.

Le projet de loi est notamment critiqué pour les atteintes à la liberté d’expression qu’il rendrait possible. Selon une analyse publiée par Amnesty International, si la loi est votée et que l’état d’urgence est proclamée, le gouvernement pourrait effectuer une surveillance sur tous les moyens de télécommunication « par tous les moyens nécessaires » et interdire ou restreindre « la diffusion d’informations susceptibles d’effrayer la population, de provoquer des troubles, d’avoir des conséquences négatives sur la sécurité nationale ou de semer la confusion en réponse à l’état d’urgence ».

La loi prévoit en outre de lourdes sanctions pénales en cas de non-respect des mesures d’urgence. « Bloquer ou entraver délibérément l’application des mesures liées à l’état d’urgence » serait passible d’une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans de prison, portée à 10 ans « si cela provoque des troubles civils ou porte atteinte à la sécurité nationale ». La « désobéissance volontaire » à l’un des pouvoirs d’urgence établis par la loi serait passible d’une peine pouvant aller jusqu’à un an de prison, portée à cinq ans si cette « désobéissance » cause des troubles civils. Les médias et ONG qui violent la loi s’exposeraient à une série de sanctions supplémentaires, dont la dissolution.

« Le projet de loi sur l’état d’urgence qui a fuité donne des pouvoirs larges, imprécis et incontrôlés à l’exécutif, tout en sapant de nombreux droits fondamentaux, comme les libertés d’association et d’assemblée, la liberté d’expression et d’information, mais aussi les droits fonciers et à la propriété », a déclaré Chak Sopheap, directrice exécutive du Centre cambodgien pour les droits de l’homme.

Le projet de loi ne prévoit pas de mécanisme d’équilibre des pouvoirs ni de révision périodique de l’état d’urgence, le gouvernement étant uniquement tenu d’informer régulièrement l’Assemblée nationale et le Sénat des dispositions prises. Il permet aussi d’invoquer la loi martiale « en cas de guerre ou de toute autre situation présentant un risque grave pour la sécurité nationale », ce qui peut laisser place à une interprétation trop large.

« Toutes les mesures d’exception prises pour répondre au Covid-19 ou à d’autres urgences doivent être proportionnées, strictement nécessaires et avoir l’impact le plus limité possible sur les droits humains, explique Nicholas Bequelin, directeur régional pour l’Asie à Amnesty International. Au lieu de s’en prendre aux détracteurs et de promulguer cette loi draconienne, le gouvernement cambodgien doit s’attacher à protéger le droit à la santé grâce à la prévention et au traitement du Covid-19. »

« La loi d’urgence va enfin permettra à Hun Sen de diriger le pays par décret, a déclaré Brad Adams, directeur du bureau Asie de Human Rights Watch. Le bureau du haut commissaire aux droits de l’homme des Nations unies doit rappeler à Hun Sen que s’il veut suspendre certains droits, il doit en informer le Comité des droits de l’homme des Nations unies. Mais pandémie ou pas, de nombreux droits ne peuvent être suspendus, et le Cambodge restera lié par ses engagements juridiques internationaux. »

Le premier ministre Hun Sen a déclaré mardi 7 avril que la proclamation de l’état d’urgence était pour le moment peu probable.  « La possibilité de déclarer l’état d’urgence pour lutter contre la pandémie de COVID-19 n’est que de 0,1%. La chance est très faible, mais nous devons avoir un mécanisme juridique entre nos mains au cas où quelque chose d’inattendu se produirait », a-t-il souligné. La loi sur l’état d’urgence devrait être examinée par l’Assemblée nationale cambodgienne d’ici la fin de la semaine, puis par le Sénat la semaine suivante.

Par Pierre Motin – Lepetitjournal.com – 9 avril 2020

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