Coronavirus : le cardinal Charles Maung Bo se joint à l’appel du pape François pour un cessez-le-feu mondial
Le cardinal Charles Maung Bo, archevêque de Rangoun et président de la FABC (Fédération des conférences épiscopales asiatiques) s’est joint à l’appel à un cessez-le-feu mondial, partagé par le pape François et par Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies, suite à la menace sans précédent de la pandémie.
Tout en évoquant la situation de son propre pays, la Birmanie, le cardinal Bo appelle à la fin des hostilités dans le monde entier. Selon l’archevêque de Rangoun, sans la fin des combats, les souffrances de beaucoup seront aggravées et de nombreuses guérisons seront retardées indéfiniment. Extraits de sa déclaration, publiée le 22 avril.
Le monde entier est en crise. Toutes les initiatives prises par nos dirigeants aujourd’hui façonneront notre nation et notre monde pour les années à venir. Les conséquences de la pandémie sont catastrophiques pour la santé publique et pour la vie sociale et économique. Si nous voulons vraiment que la Birmanie devienne un peuple uni, pacifique et prospère, il faut privilégier dès maintenant des décisions respectueuses, énergiques et efficaces. Il nous faut agir de façon avisée et cohérente, en étant tournés vers l’avenir et en mettant de côté les conflits. « Mettons un terme au fléau de la guerre et luttons contre la maladie qui ravage notre monde. Cela commence par l’arrêt des combats. Partout. Tout de suite. C’est ce dont nous tous, membres de la famille humaine, avons besoin. Aujourd’hui plus que jamais », a déclaré le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, le 23 mars 2020. Le pape François, qui continue de penser à la Birmanie depuis sa visite apostolique en 2017, a partagé cet appel [ndlr : durant l’Angélus du 29 mars, prononcé depuis la bibliothèque du Palais apostolique] : « Puisse l’engagement commun contre la pandémie conduire chacun à reconnaître notre besoin de renforcer nos liens fraternels en tant que membres d’une unique famille. […] Les conflits ne se résolvent pas par la guerre! Il est nécessaire de surmonter les antagonismes et les oppositions, à travers le dialogue et une recherche constructive de la paix. »
Je suis convaincu que la poursuite des opérations militaires, surtout alors que tout le pays souffre de la crise sanitaire, aura des conséquences catastrophiques pour notre nation. Il est donc temps de construire la Birmanie comme un nation unifiée, pacifique et prospère, et membre de la famille des nations. Les conflits rendent le pays particulièrement vulnérable. Les dirigeants nationaux et locaux sont capables de choisir entre la voie de la vérité et de la coopération pour le bien de tous, afin d’unir la nation, et la voie de la poursuite des conflits, qui ne conduira qu’à des conséquences encore plus dramatiques pour tous ceux qui sont déjà dans une grande détresse. Comme l’a déclaré la Conseillère d’État (Aung San Suu Kyi) le 16 mars dernier dans son message télévisé, « je voudrais vous signaler un élément essentiel pour réduire les risques liés à la pandémie ; c’est très simple, il s’agit du peuple ».
« J’appelle aujourd’hui à un cessez-le-feu immédiat »
On nous dit régulièrement, avec raison, que la coopération de tous est essentielle pour dépasser cette épreuve. C’est particulièrement vrai concernant la coopération civile et militaire. Pour avancer comme un seul peuple, nous avons besoin de pouvoir faire confiance à toutes les autorités publiques, aux médias et à la science. Nous avons pu bénéficier d’informations régulières et d’alertes de la part du ministère de la Santé et des Sports. Les mesures de quarantaine sont justifiées. La libération des détenus dans les prisons surpeuplées est également bienvenue pour la sécurité de tous. Nous sommes également reconnaissants envers la Conseillère d’État qui communique directement sur les réseaux sociaux pour montrer son empathie envers le peuple. Mais la poursuite des opérations militaires contredit toutes ces initiatives éclairées. Les militaires sont exposés inutilement au virus. Les civils sont mis en danger, même quand les bombardement visent des cibles militaires. Les négociations de paix sont ébranlées par la poursuites des menaces agressives. L’économie, déjà affaiblie, est également menacée par la poursuite des tensions militaires.
Le risque de foyers de contagion dans les camps pour les personnes déplacées internes (IDP), parmi les détenus et dans les espaces surpeuplés représente également une menace aggravée pour la population environnante. « La furie avec laquelle s’abat le virus montre bien que se faire la guerre est une folie », a déclaré Antonio Guterres. « C’est la raison pour laquelle j’appelle aujourd’hui à un cessez-le-feu immédiat, partout dans le monde. L’heure est venue de laisser les conflits armés derrière nous pour concentrer nos efforts sur le véritable combat de nos vies. » De nombreuses nations et combattants ont répondu positivement à cet appel. Des groupes armés au Cameroun, aux Philippines, au Yemen et en Syrie ont déjà pris des initiatives pour réduire les violences. La guerre civile au Yemen, qui se poursuit depuis cinq ans, a entraîné l’une des pires crises humanitaires au monde. En Syrie, le risque épidémique menace 6,5 millions de personnes déplacées dans le pays, affectées par neuf ans de conflit.
Dialogue et coopération
Afin de permettre à toutes les aides de rejoindre les populations vulnérables et exposées à la contagion, le pape François a encouragé « la création de couloirs pour l’aide humanitaire, l’ouverture à la diplomatie, et l’attention à l’égard de ceux qui se trouvent dans des situations de très grande vulnérabilité ». Ces dernières années, la Birmanie s’est attirée avec injustice de nombreuses critiques, car cela ne reflète pas la véritable identité du peuple birman. En voulant réagir à cette crise en soutenant la solidarité avec nos pays voisins, nous voulons montrer que la Birmanie est membre légitime de la famille humaine. La crise que nous traversons est une crise globale. Déposons donc les armes et renonçons à tous les actes d’agression. Armons-nous plutôt de sincérité et de vérité. Osons choisir la voie difficile en dépassant les différences, avec courage et intelligence. Ne cachons pas notre humanité derrière les fusils. En fin de compte, ce serait une véritable faiblesse. Notre partenaires aux sein de Religions for Peace [ndlr : une conférence mondiale de représentants des religions dédiée à la défense de la paix interreligieuse] ont montré que le dialogue est possible et qu’il porte du fruit. L’Église catholique en Birmanie a dévoilé un projet national de coopération à l’échelle locale, avec les autorités à tous les niveaux. Nous sommes toujours prêts à servir de médiateurs et à encourager le dialogue entre toutes les parties.
Agence Eglise d’Asie – 23 avril 2020
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