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Les éléphants s’accrochent au branches en Thaïlande

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Fermeture des frontières et absence de touristes, huit mois après le début de la pandémie de Covid-19, la situation des éléphants domestiqués en Thaïlande est de plus en plus précaire et les perspectives semblent bien sombres pour de nombreux camps. 

Depuis le 25 mars 2020, la Thaïlande a imposé un certain nombre de restrictions pour lutter contre l’épidémie du nouveau coronavirus. Parmi celles-ci, la fermeture des attractions touristiques telles que les camps d’éléphants et la fermeture des frontières. Malgré une réouverture des attractions avec des éléphants au début du mois d’août, l’absence de touristes étrangers se fait sentir et les camps, huit mois après le début de la pandémie, sont toujours désertés. Plus les mois passent, plus l’argent manque pour nourrir les pachydermes et leur mahouts. De nombreux camps font preuve de créativité pour assurer leur survie, mais l’avenir semble bien sombre pour beaucoup d’entre eux. 

“C’est vraiment une situation inattendue, je pensais que nous en aurions pour 3 ou 4 mois, mais bientôt nous allons arriver à une année complète. Pour beaucoup de propriétaires d’éléphants et de camps, nous sommes réellement en mode survie”, commente d’emblée Lek Saengduean Chailert, fondatrice du Elephant Nature Park et de Save Elephant Foundation situés à Mae Rim. 

La province de Chiang Mai comptabilise environ 900 éléphants répartis dans 200 camps ou sanctuaires. Sur l’ensemble de la Thaïlande, le dernier recensement d’éléphants domestiques en Thaïlande s’élève à 3.783 tandis que la population d’éléphants sauvages est estimée entre 3.100 et 3.600. 

Des aides insuffisantes

Un pachyderme adulte mange jusqu’à 300 kilos d’herbes et boit 200 litres d’eau. Selon les estimations, pour nourrir l’animal et son mahout, il faut compter entre 1.000 et 2.000 bahts par jour. 

“Pendant la période mars, avril et, mai, la plupart des camps pouvaient vivre sur leurs économies, mais là cela devient trop long et les aides du gouvernement manquent. D’ailleurs, nous ne pouvons pas compter sur ces aides, il faut trouver d’autres solutions!” ajoute Lek.

Pour aider les propriétaires d’éléphants et les camps, l’office du tourisme de Thaïlande (TAT) a lancé une campagne “Help Community, Help Elephant, Help Nation –  Aide la communauté, aide les éléphants, aide le pays”. À travers cette initiative, la TAT a pu apporter une aide financière à 109 camps, ce qui représente un total de 1.455 éléphants. 

Entre le mois de juin et le mois d’août, les propriétaires ont pu déposer leur dossier, ceux qui ont été validés se sont vus attribuer une somme de 10.000 bahts par éléphant. 

Le Mae Wang Elephant Camp au sud de Chiang Mai a ainsi reçu 120.000 bahts d’aide pour nourrir leurs douze pachydermes, une somme versée une seule fois. 

“Nous avons reçu une somme d’environ 35 millions de bahts de la part du gouvernement, cela a été un gros projet de la TAT, mais qui s’est malheureusement arrêté avec la reprise du tourisme domestique. Aujourd’hui, nous essayons d’encourager les Thaïlandais à visiter les attractions d’éléphants via nos outils de communication”, justifie Runjuan Tongrut, directrice exécutive du département de communication à destination des Américains à la TAT. 

Si l’aide du gouvernement a été appréciée par ceux qui en ont bénéficié, la somme d’argent versée n’a eu lieu qu’une seule fois et ne permet pas de faire face aux prochains mois. 

Innover

Pour faire face aux dépenses, les camps tentent de proposer d’autres activités et d’innover. Le Maerim Elephant Sanctuary a ainsi organisé deux fois des journées “piscines avec les éléphants” où le concept est d’inviter les locaux pour une journée au bord de la piscine en famille ou entre amis et de rencontrer par la même occasion les éléphants du camp. Les bénéfices engendrés par la vente de boissons et de nourritures sont utilisés pour les éléphants. 

Pour apporter un supplément de nourriture au Mae Wang Elephant Camp un appel aux dons a été lancé sur Internet. “Nous avons lancé un appel aux dons au début du confinement, mais le dernier versement que nous avons eu date d’il y a deux mois et au total nous n’avons récolté que 80.000 bahts. Si nous ne relançons pas les appels sur les réseaux sociaux, il y a peu de mobilisation”, commente Marie-Anne, responsable marketing de l’agence éthique Chi Jungle Man qui travaille avec le Mae Wang Elephant Camp. “La propriétaire du refuge continue de payer pour la nourriture des éléphants ainsi que le salaire des mahouts. L’inconnue est de savoir combien de temps la propriétaire continuera d’avancer l’argent pour nourrir les pachydermes”, ajoute-t-elle. 

L’Elephant Nature Park dispose d’une boutique en ligne où il est possible d’acheter des t-shirts, du savon ou du café, ainsi que des bons d’achat pour anticiper une prochaine visite. De son côté, en plus des bons d’achat, le Patara Elephant Farm propose de venir visiter son centre gratuitement pour observer les éléphants en échange de dons pour acheter de la nourriture. 

De son côté, The Human Elephant Learning Programs Foundation (H-ELP) propose des rencontres via Zoom avec les éléphants. Il est ainsi possible d’avoir un appel en vidéo pendant dix minutes avec un éléphant au prix de 75 dollars. 

Des initiatives qui permettent de survivre en attendant des jours meilleurs à certains camps, pour d’autres la situation a déjà atteint le fond. 

De sombres perspectives

“Il ne s’agit pas seulement de les nourrir, mais aussi de les soigner. À l’Elephant Nature Park, nous récupérons des éléphants qui ont été battus ou qui sont âgés, cela engendre beaucoup de frais”, précise Lek. En plus des 94 pachydermes résidents à l’Elephant Nature Park, 22 autres sont venus compléter la horde. “Des propriétaires nous ont demandé de prendre soin de leurs animaux parce qu’ils n’en avaient pas les moyens, j’essaye de ne plus en accueillir, car à ce rythme-là, je ne tiendrais que jusqu’au mois de juin 2021”, confie l’activiste. 

Le Patara Elephant Farm à Chiang Mai, un sanctuaire qui sauve des éléphants en détresse, de soin et de reproduction des éléphants, estime pouvoir tenir jusqu’à la fin de l’année 2020 comme l’explique son fondateur Theerapat Trungprakan : “J’ai fondé ce centre il y a 20 ans, à partir de janvier, je n’aurais pas le choix que d’emprunter de l’argent à la banque. Nous avons déjà réduit les salaires des mahouts de moitié, ils sont passés de 12.000 à 6.000 bahts par mois. Avant le Covid-19, nous avions en moyenne 75 visiteurs par jour, aujourd’hui nous en avons à peine un ou deux”.

D’autres camps ont pu accumuler suffisamment d’économies pour se laisser un peu plus de temps avant de se retrouver en difficulté. “En général, la saison touristique s’étend de novembre à avril, d’une certaine façon nous avons l’habitude d’avoir des périodes creuses et a priori nous devrions être capables de nourrir les éléphants pendant encore un an ou un an et demi. De plus, nous avons bénéficié des aides du gouvernement”, déclare Somchai Bunkueng, le directeur de Kanta Elephant Sanctuary à Mae Taeng.  

Dans le nord de la Thaïlande, certains estiment qu’environ 85 camps auraient fermé leurs portes. De nombreux camps ont l’habitude de louer les éléphants, avec la cessation des activités, ils n’ont eu d’autre choix que de renvoyer les éléphants et leur mahout chez eux. 

Ce renvoi des camps inquiète particulièrement Lek : “Des propriétaires d’éléphants n’ont pas eu le choix que de vendre leurs éléphants à de grosses compagnies qui y voient un investissement. Actuellement le prix des éléphants est vraiment très bas, avant le Covid-19 un éléphanteau s’achetait pour 100.000 dollars, aujourd’hui il ne coûte plus que 50.000 dollars. J’observe également une autre problématique, les éléphants font leur retour dans l’industrie du transport du bois à la frontière entre le Myanmar et la Thaïlande, une activité interdite depuis 1989. Les éléphants font aussi leur retour dans la rue pour mendier. J’ai l’impression que la vie des éléphants s’annonce difficile dans le futur”. 

Par Catherine Vanesse – Lepetitjournal.com – 23 novembre 2020

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