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En Birmanie, des manifestants défient la junte avec des œufs de Pâques

Malgré le lourd bilan de la répression menée par l’armée depuis le putsch du 1er février, les opposants continuent de défier le régime. Le pape François a exprimé sa « proximité » avec la jeunesse du pays et ses aspirations démocratiques.

La mobilisation prodémocratie se poursuit en Birmanie. En ce dimanche de Pâques, le mouvement de désobéissance civile a imaginé une nouvelle campagne : diffuser des photos d’œufs sur les réseaux sociaux décorés de messages contre le régime : « Sauvez la Birmanie »« Nous voulons la démocratie »« Dégageons MAH [le puissant chef de la junte, Min Aung Hlain] ».

Depuis le putsch du 1er février, qui a renversé le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi, des dizaines de milliers de salariés se sont mis en grève et des secteurs entiers de l’économie sont paralysés. Plus de 550 civils, dont des femmes et des enfants, ont été tués par les forces de sécurité. Le bilan pourrait être beaucoup plus lourd : quelque 2 700 personnes ont été arrêtées. Beaucoup, détenues en secret, sans accès à leurs proches ou à un avocat, sont portées disparues.

« Jésus est ressuscité : alléluia, la Birmanie ressuscitera »

Quatre civils sont encore tombés sous les balles samedi 3 avril, et un homme de 30 ans a été abattu dimanche, dans l’Etat Kachin, à l’extrême nord de la Birmanie. Malgré cela, les opposants au coup d’Etat continuent de défier le régime militaire.

« La créativité, la bravoure et le courage de notre peuple sont l’avenir de la Birmanie », a tweeté docteur Sasa, envoyé spécial auprès de l’Organisation des Nations unies (ONU) du gouvernement civil déchu. Dans son message de Pâques, le pape François a exprimé sa « proximité (…) avec les jeunes Birmans qui s’engagent pour la démocratie en faisant entendre pacifiquement leur voix »« Jésus est ressuscité : alléluia, la Birmanie ressuscitera », a tweeté pour sa part Charles Bo, premier cardinal du pays, très majoritairement bouddhiste.

La junte de son côté a assuré, dans un média d’Etat, que les forces de sécurité « faisaient preuve de la plus grande retenue ». Sur le terrain, les généraux birmans ont coupé l’accès à Internet pour une grande majorité de la population, ordonnant la suspension des données mobiles et des connexions sans fil. Ils resserrent aussi leur étau judiciaire sur Aung San Suu Kyi, accusée notamment de corruption et d’avoir violé une loi sur les secrets d’Etat datant de l’époque coloniale. Si elle est reconnue coupable, l’ex-dirigeante de 75 ans, détenue au secret mais « en bonne santé » selon ses avocats, risque d’être bannie de la vie politique et encourt de longues années de prison.

Des mandats d’arrêt ont par ailleurs été émis contre 60 célébrités birmanes – chanteurs, mannequins, influenceurs sur les réseaux sociaux – accusées d’avoir diffusé des informations susceptibles de provoquer des mutineries dans les forces armées.

Des factions rebelles soutiennent le mouvement de désobéissance

Le bain de sang contre les civils a provoqué la colère des principales factions ethniques rebelles du pays. Dix d’entre elles ont apporté leur soutien au mouvement de désobéissance civile et prévu de « réexaminer » le cessez-le-feu signé avec les militaires à partir de 2015. La puissante Union nationale karen, l’un des plus importants groupes armés du pays, s’est emparée la semaine dernière d’une base militaire dans le sud-est du pays, tuant dix soldats.

L’armée a riposté par des raids aériens, les premiers depuis vingt ans dans cette région, faisant plusieurs victimes et de nombreux déplacés. D’autres rébellions ont menacé de reprendre les armes contre les militaires. L’émissaire de l’ONU pour la Birmanie, Christine Schraner Burgener, a mis en garde contre un risque « sans précédent » de « guerre civile ».

Le Monde avec Agence France Presse – 4 avril 2021

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