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Le kyat, en voie de guérison ou simple rémission ?

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Échangé à 1 395 kyats pour un dollar en janvier dernier, la devise étasunienne se retrouvait cotée à entre 2 700 et 2800 kyats le 28 septembre. Une rapide descente aux enfers. La monnaie birmane semble toutefois se stabiliser ces derniers jours suite à quelques décisions prises par le nouveau gouvernement issu du coup de force militaire du 1er février 2021.

La nouvelle équipe mise en place à la tête de la Banque centrale de Birmanie (CBM) avait dans un premier temps, en août, voulu maintenir les fluctuations du kyat autour de plus ou moins 0,8 % de son taux de référence par rapport au dollar, qui était de 1650 kyats pour un dollar étasunien. Elle a dû abandonner assez vite cette politique faute des réserves en devises pour la tenir.

Car bien sûr, le problème financier des Birmans réside dans leur très faible stock de devises étrangères. Les actuels dirigeants se gardent bien de révéler ce dont ils disposent mais selon la Banque mondiale, avec toutes les incertitudes de la corruption interne prouvée de cette institution, ces réserves s’élevaient à 7,67 milliards de dollars fin 2020. Ce qui est très peu. La France dispose d’environ 210 milliards d’euros et les réserves des voisins cambodgien et thaïlandais sont respectivement de quelque 21 et 258 milliards de dollars étasuniens.

Plus de contrôles des banques birmanes

La CBM a donc dû utiliser d’autres outils que ses réserves pour redonner un peu de stabilité à sa monnaie. Et elle est donc partie à la chasse aux devises, en réclamant notamment à la Myanmar Foreign Trade Bank (MFTB), par laquelle les fonds d’imports/exports transitent, qu’elle remette les réserves dont elles disposent et ne cherchent pas à en dissimuler. La Banque centrale a par exemple adopté un règlement obligeant les exportateurs à vendre leurs excédents de devises aux banques dans les 30 jours suivant leur réception, ce qui a augmenté la quantité de devises disponibles et contribue alors à faire baisser le taux de change ne faveur du kyat.

Les autorités financières ont semble-t-il procédé de même avec toutes grandes banques susceptibles d’avoir des fonds « cachés », mettant en place une traçabilité des échanges – à qui on transfert, pour quelle opération… Des informations de base que n’importe quelle banque occidentale exige – et souvent beaucoup plus – mais qui n’étaient pas dans les habitudes des Birmans jusque ces dernières semaines. Car évidemment ce genre de transparence rend les transferts douteux et illégaux plus difficiles.

Vers un assainissement du système bancaire birman ?

L’une des conséquences indirectes de cette nouvelle réglementation a été la réticence des banques commerciales birmanes – Aya, CB, Yoma, KBZ, MCB… – à réaliser les virements électroniques de banque a banque, même quand les titulaires des comptes insistaient pour que les opérations se fassent. Cet abus de pouvoir des établissements bancaires traduit sans doute la fragilité de leurs comptes. Ces banques sont souvent grevées de crédits « pourris » et les fonds disponibles sont sans doute loin des chiffres affichés. Cela est depuis longtemps une question que se posent les observateurs financiers du pays, soucieux depuis plusieurs années que certaines banques de renom ne fassent faillite. En introduisant par nécessité un peu de transparence financière, il se peut donc bien que la crise politique et économique actuelle aboutisse très involontairement à un assainissement des finances locales, notamment en « nettoyant » partiellement le secteur bancaire d’agents peu solvables qui continuent à faire les beaux…

Mais pour ce qui est du dollar, il est à craindre que son léger rebond ne puisse pas durer si le pays ne rouvre pas ses portes aux visiteurs et surtout aux investisseurs. La Birmanie a besoin d’argent frais, ce qui ne sera pas simple pour un pays dont de nombreuses entreprises sont sous sanctions économiques de la part de l’Union européenne et des Etats-Unis.

Plus d’exportations, la clef financière de la crise

Sans compter la difficulté pour ce gouvernement à faire rentrer de l’argent. Par exemple, une denrée aussi essentielle et coûteuse que l’électricité n’est plus facturée dans la plupart des endroits du pays, faute d’une administration pour superviser la chose. De même, de nombreux commerces « oublient » de poser les timbres fiscaux lors des transactions commerciales. L’Etat conserve des recettes malgré tout mais celles-ci sont en nette diminution, c’est certain. Et il doit importer beaucoup de matières premières nécessaires, comme le gaz de cuisine, qui diminuent d’autant les fonds disponibles.

Enfin, et c’est sans aucun doute la clef financière des prochaines semaines, une hausse des exportations est impérative pour faire rentrer des devises. Elle est attendue en novembre et décembre. Mais encore faut-il que les frontières avec les voisins directs rouvrent afin que le commerce reprenne ou que le trafic maritime retrouve un niveau moins anormal.

Impossible de savoir aujourd’hui dans quel sens le fléau de la balance va pencher, mais le dollar qui cote à 1978 kyats sur le site de la CBM le 8 octobre s’échange ce même jour entre 2050 et 2200 kyats selon les officines de changeurs autorisés.

Lepetitjournal.com – 11 octobre 2021

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