Birmanie : la junte boycotte un sommet international, Aung San Suu Kyi témoigne à son procès
La junte birmane a boycotté mardi le sommet des pays de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (Asean) auquel son chef n’a pas été convié, renforçant son isolement neuf mois après le coup d’Etat militaire.
La réunion virtuelle, en raison des difficultés de déplacement liées au Covid-19, a constitué le coup d’envoi de trois jours de rencontres organisées sous l’égide du Brunei.
Le président américain Joe Biden a à cette occasion exprimé sa « profonde préoccupation » face aux « atroces » violences en Birmanie, demandant la libération de « ceux injustement détenus » et de remettre ce pays sur « la voie de la démocratie ».
La situation en Birmanie, toujours en plein chaos depuis le putsch du 1er février et la sanglante répression de la dissidence, a figuré mardi en tête de l’ordre du jour des discussions de l’Asean.
Face aux appels à désamorcer la crise, cette organisation, dont la Birmanie est membre, a préparé une feuille de route visant à rétablir la paix, mais des doutes ont été émis quant à l’engagement des généraux birmans à suivre ce plan.
Leur refus de laisser un envoyé spécial rencontrer la dirigeante destituée Aung San Suu Kyi a incité la semaine passée l’Asean à exclure des pourparlers le chef de la junte, Min Aung Hlaing, qui a pris le pouvoir à l’issue du coup d’Etat.
Ce putsch a mis fin à la brève expérience démocratique en Birmanie et Aung San Suu Kyi fait à présent face à une série d’accusations dont celle d’incitation à des troubles publics -pour lesquelles elle avait plaidé non coupable en septembre-, devant un tribunal qui pourrait la conduire en prison pour de longues années.
Jugée depuis juin après avoir été renversée par les militaires, la lauréate du prix Nobel 1991, âgée de 76 ans, a témoigné mardi pour la première fois devant cette instance.
La mise à l’écart de Min Aung Hlaing du sommet de l’Asean a été qualifiée par le régime birman de violation de la politique de non-ingérence dans les affaires de ses Etats membres.
Ce groupe de dix pays de l’Asie du Sud-Est a invité à sa place Chan Aye, le directeur général du ministère des Affaires étrangères.
Une offre que le régime birman a déclinée, affirmant que dépêcher un responsable d’un rang inférieur aurait « affecté la souveraineté et l’image de notre pays ».
– La junte critiquée –
Pour Aaron Connelly, un spécialiste de l’Asie du Sud-Est à l’Institut international d’études stratégiques, l’exclusion du chef de la junte est « extrêmement significative ».
« C’est la sanction la plus importante que l’Asean ait jamais infligée à un Etat membre », a-t-il relevé.
Mais les observateurs pensent qu’il est peu probable que cette organisation aille plus loin, par exemple en suspendant la Birmanie, et ils considèrent comme peu probable que les rencontres de cette semaine débouchent sur des décisions qui pourraient inciter les généraux birmans à changer de cap.
Alors que des pays membres tels que la Malaisie, Singapour et l’Indonésie ont fait pression pour que l’Asean prenne des mesures en réponse au putsch, d’autres se sont montrés plus discrets.
Le Premier ministre singapourien Lee Hsien Loong a ainsi regretté mardi à l’ouverture du sommet en ligne de cette organisation « la lenteur des progrès » en Birmanie.
Et même son homologue cambodgien Hun Sen, dont le gouvernement est souvent accusé d’autoritarisme, a également déploré « le manque de coopération » de la part de la junte birmane.
Dans un communiqué, la présidence du sommet de l’Asean a appelé à l' »arrêt immédiat des violences », sans toutefois évoquer la décision de la Birmanie de boycotter cette réunion.
Elle a aussi mentionné les inquiétudes suscitées par de « graves incidents » dans la mer de Chine méridionale, où Pékin et plusieurs pays d’Asie du Sud-Est ont des revendications territoriales qui se chevauchent.
La pandémie figure parmi les autres thèmes devant être abordés par le sommet auquel, outre les Etats-Unis, la Chine et la Russie doivent participer.
Agence France Presse – 26 octobre 2021
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