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La « chasse aux sorcières » se poursuit au Cambodge, une cinquantaine d’opposants emprisonnés

Lors d’un nouveau procès collectif qui s’est achevé ce mardi 14 juin, une cinquantaine d’opposants au pouvoir ont été condamnés à des peines de cinq à huit ans de prison.

Elle s’est présentée face à la cour vêtue en statue de la liberté enchaînée pour représenter la libre-pensée contre le régime autocratique ​d’Hun Sen. Et quelques minutes plus tard, Theary Seng était arrêtée par une vingtaine de policiers, traînée jusqu’à la fourgonnette la menant tout droit à sa cellule.

Mardi à Phnom Penh, cette avocate américano-cambodgienne et défenseuse des droits humains a fait les frais de l’implacable répression que mène le pouvoir cambodgien contre chaque voix critique du régime. Le Premier ministre Hun Sen, 69 ans, ex-khmer rouge au pouvoir depuis 37 ans qui verrait bien son fils lui succéder, s’évertue à mater toute dissidence, à l’approche d’élections législatives prévues en 2023. Lors de celles de 2018, contestées, son Parti du Peuple Cambodgien s’était déjà octroyé tous les sièges.

Pas de justice au Cambodge

À 51 ans, Theary Seng a été condamnée à six ans de prison pour complot ​et incitation ​à semer le trouble dans l’ordre public, dans le cadre d’un procès de masse visant 130 opposants politiques. Cinquante et un d’entre eux ont écopé des peines de prison allant de cinq à huit ans pour ces mêmes chefs d’accusation.

Ce qu’on leur reproche ? Ils ont publiquement soutenu le retour au Cambodge, finalement avorté, du chef de l’opposition Sam Rainsy en 2019. Ce dernier, en exil en France, a été condamné à cinq ans de prison par contumace ce mardi.

Je me suis préparée à être incarcérée depuis bientôt deux ans, quand le procès a débuté​, expliquait hier Theary Seng devant la cour, peu avant son arrestation. Les charges qui pèsent contre moi et contre les autres prévenus sont absurdes. Ce procès n’est qu’un théâtre politique​. À l’annonce du verdict, les sympathisants présents sur place scandaient : Il n’y a pas de justice au Cambodge !

Malgré la dissolution à marche forcée en 2017 du Parti du Sauvetage National du Cambodge (PSNC), le principal parti d’opposition, la justice cambodgienne a multiplié les attaques contre l’opposition.

Chasse aux sorcières

En mars 2021, neuf cadres du PSNC en exil avaient été condamnés à plus de vingt ans de prison pour attaque contre l’État​. Un an plus tard, vingt soutiens de l’opposition ont écopé de dix ans de prison. Kem Sokha, le cofondateur du PSNC encourt trente ans de réclusion pour trahison ​dans un procès entamé il y a deux ans et demi.

Cette chasse aux sorcières sans fin à l’encontre des voix critiques doit cesser​, appelle de ses vœux Chak Sopheap, directrice du Centre Cambodgien pour les droits de l’homme. L’ONG Human Rights Watch dénonce un simulacre de procès […] exposant les craintes du gouvernement de laisser le moindre vestige de démocratie au Cambodge.

Las, il est peu probable que ces critiques parviennent aux oreilles du gouvernement. Ce mardi, alors que la cour municipale de Phnom Penh rendait son jugement, le Parti du Peuple Cambodgien portait plainte contre Son Chhay, vice-président du Candlelight Party (parti de la bougie), tout jeune mouvement d’opposition qui a obtenu 22 % des voix aux municipales le 5 juin. Il lui réclame un million de dollars de dommages et intérêts pour des critiques ayant entaché la réputation du parti ».

Par François Camps – Ouest France – 14 juin 2022

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