Cambodge. Les autorités doivent annuler la condamnation pour trahison d’un dirigeant de l’opposition, qui est sans fondement
À l’approche du procès en appel, mardi 30 janvier, de Kem Sokha, dirigeant de l’opposition cambodgienne déclaré coupable de trahison et condamné à 27 ans d’emprisonnement, Montse Ferrer, directrice régionale adjointe pour la recherche à Amnesty International, a déclaré :
« Nous exhortons les autorités cambodgiennes à annuler la condamnation pour trahison infondée prononcée contre Kem Sokha, et à mettre un terme à la répression qu’elles exercent actuellement contre les groupes d’opposition.
« La déclaration de culpabilité de Kem Sokha, leader de l’opposition politique, et sa condamnation à 27 ans de prison, témoignent du mépris des autorités cambodgiennes pour les droits humains et l’état de droit.
Toute personne osant s’élever contre le gouvernement est en danger. Les autorités cambodgiennes doivent respecter, protéger, promouvoir et concrétiser les droits humains de tous et toutes dans le pays, notamment les droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association, et mettre fin à la restriction croissante de l’espace civique.
« Kem Sokha a passé des années en détention, a fait des allers-retours en prison et a été assigné à résidence, manœuvres quasiment incessantes visant à le réduire au silence. Les autorités cambodgiennes doivent le libérer immédiatement et sans condition. »
Contexte
Kem Sokha est l’ancien président du Parti du sauvetage national du Cambodge (PSNC). Le 3 septembre 2017, il a été arrêté et inculpé au titre de l’article 443 du Code pénal pour « conspiration avec [une] puissance étrangère ». Les charges retenues affirment que Kem Sokha avait un « plan secret » mis en œuvre depuis 1993 pour renverser le gouvernement. Il a été déclaré coupable de trahison et condamné à 27 ans de prison à l’approche des élections nationales de 2023.
Durant la campagne électorale de l’année dernière, des opposant·e·s politiques ont été harcelés, menacés, frappés et emprisonnés à l’issue de procès collectifs. Des militant·e·s de partis d’opposition ont été agressés dans la rue à coups de matraque métallique à plusieurs reprises, un militant a même été poignardé à mort en public en 2021, ce que beaucoup ont qualifié d’attaque ciblée.
Au cours du procès de Kem Sokha, qui a duré plus d’un an, en partie du fait de retards liés à la pandémie de Covid-19, l’accusation a fourni peu de preuves, si ce n’est le contenu d’un discours prononcé par le militant en Australie en 2013, dans lequel il déclarait que le gouvernement américain lui avait conseillé de créer une organisation non gouvernementale de défense des droits humains.
Kem Sokha a passé un an en détention provisoire dans une prison lointaine et un autre en résidence surveillée. Cela reflète une tendance plus large à maintenir certaines personnes en détention provisoire pour de longues périodes, une pratique établie dans tout le pays.
La Cour suprême du Cambodge a dissous le PSNC deux mois après l’arrestation de Kem Sokha, à la suite d’accusations selon lesquelles le parti complotait pour renverser le gouvernement avant les élections de 2018, au terme desquelles le Parti du peuple cambodgien (PPC) de l’ancien Premier ministre Hun Sen a remporté la totalité des 125 sièges. En 2023, après la condamnation de Kem Sokha, le PPC a de nouveau remporté les élections, aucun parti d’opposition viable ne s’étant présenté au scrutin.
Au moins 23 membres de groupes d’opposition sont actuellement maintenus en détention par les autorités cambodgiennes, après avoir été arrêtés arbitrairement sur la base de fausses accusations, pour avoir simplement exercé leurs droits fondamentaux. Des dizaines de membres du PSNC ont été condamnés tout au long de l’année 2022 à l’issue de procès collectifs, qui les ont privés du droit à un procès équitable et ont tourné la justice en dérision.
Amnesty International – 29 janvier 2024
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