Le Vietnam libère des milliers de prisonniers, mais aucun dissident
À l’occasion de la Fête nationale vietnamienne, le 2 septembre, le régime communiste de Hanoï a décidé de libérer près de 3 800 prisonniers de droit commun avant la fin de leur peine, dont 20 étrangers. Aucun prisonnier politique n’a bénéficié de cette amnistie annuelle, appliquée mardi 1er octobre.
Chaque année, à l’occasion de la Fête nationale d’indépendance du Vietnam, le 2 septembre, le régime communiste de Hanoï accorde son pardon à un certain nombre de prisonniers de droit commun. Cette année, les autorités ont consenti à une libération anticipée de près de 3 800 prisonniers, dont une vingtaine d’étrangers originaires du Laos, de Thaïlande, de Chine, d’Islande et des États-Unis… Mais aucun prisonnier condamné pour « propagande » contre l’État ou tentative de renversement du régime communiste, une accusation fréquemment portée contre les activistes.
Ces amnisties interviennent quelques jours après la libération légèrement anticipée de deux militants écologistes de premier plan, Hoang Thi Minh Hong et Tran Huynh Duy Thuc. En septembre 2023, la première avait été condamnée à trois ans de prison pour « évasion fiscale ». Elle avait créé l’ONG Change pour inciter les Vietnamiens, particulièrement les jeunes, à agir sur les questions environnementales urgentes, notamment le changement climatique, le commerce illégal d’espèces sauvages et la pollution.
Accusé d’avoir tenté de renverser le régime et condamné en 2010, Tran Huynh Duy Thuc, quant à lui, purgeait une peine de seize ans. Ces deux libérations ont coïncidé avec la visite du président et secrétaire général du Parti communiste vietnamien, To Lam, aux États-Unis, notamment pour assister à la 79e session de l’Assemblée générale des Nations unies.
Vaste campagne anticorruption
Depuis quelques années, le régime a lancé une vaste campagne anticorruption dans tout le pays sur le modèle chinois de Xi Jinping depuis 2013. Le deuxième procès d’une dirigeante d’un géant de l’immobilier, Truong My Lan, patronne du conglomérat Van Thinh Phat, s’est ouvert le 19 septembre dernier à Ho Chi Minh-Ville (Sud). Déjà condamnée à mort pour avoir orchestré le plus grand scandale financier au Vietnam, Truong My Lan a été reconnue coupable en avril dernier d’avoir détourné pendant une décennie près de 27 milliards de dollars (25 milliards d’euros) via un montage d’obligations. Le tout avec la complicité de fonctionnaires chargés de superviser le secteur bancaire.
L’affaire, qui a choqué l’opinion publique, provoquant des rassemblements exceptionnellement tolérés par le pouvoir communiste, a révélé la porosité des milieux économiques et politiques, parfois liés par des pactes de corruption. Des milliers de personnes, dont d’anciennes stars du monde des affaires et des ministres, ont déjà été prises dans les filets de cette campagne.
Par ailleurs, le régime à parti unique, qui veut faire taire toute dissidence politique, a multiplié les arrestations et condamnations ces dernières années contre des militants politiques, en particulier pour des publications sur les réseaux sociaux. En 2024, plus de 160 prisonniers politiques étaient en détention, d’après l’ONG Human Rights Watch. Un nombre largement sous-évalué selon d’autres sources, mais impossible à vérifier en l’absence de toute statistique officielle. Tous les médias indépendants sont interdits dans le pays, classé à la 174e place sur 180 pays dans le classement 2023 de Reporters sans frontières sur la liberté de la presse.
Par Dorian Malovic – La Croix – 2 octobre 2024
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