Le Vietnam communiste réduit sa fonction publique
Hanoi compte supprimer près d’un tiers des agences gouvernementales et autres ministères, ils passeront de 30 à 22.
Des coupes drastiques qui font écho à celles menées de l’autre côté du Pacifique par Donald Trump et Elon Musk, disrupteurs en chef et libertariens assumés qui coupent tous azimuts dans le budget fédéral des États-Unis.
Le premier ministre vietnamien Tô Lam n’a rien du tempérament survolté des deux Américains. Il reprend pourtant volontiers leur rhétorique outrancière lorsqu’il s’agit de la fonction publique. Ainsi, il déplore que les agences étatiques soient, je cite, « des planques pour les fonctionnaires médiocres » et compare ces derniers, je cite encore, « à des tumeurs ».
Il y a aussi des raisons financières, diminuer la masse salariale, rationaliser les dépenses, doper l’économie, sauf que l’économie vietnamienne se porte au mieux. Le pays affiche une croissance à nous faire pâlir de jalousie, plus de 7% l’an dernier.
Mais le Vietnam a un talon d’Achille, ses exportations représentent plus de 90% du PIB. Plus grave, un tiers de ces mêmes exportations a pour destination les Etats-Unis. Une fragilité de taille à l’heure où Washington barricade son marché intérieur en rehaussant ses droits de douane.
Quels seront les premiers fonctionnaires visés ?
Difficile de le dire. Ce qu’on sait, c’est que les médias ont déjà commencé à en faire les frais. Cinq chaînes de télévision publique ont récemment dû rendre l’antenne. Les forces de l’ordre seront elles aussi ciblées. L’exécutif entend compenser la baisse du nombre de policiers par une surveillance accrue de l’espace public via la vidéosurveillance.
Il promet d’installer 40 000 caméras de plus à Hanoï, qui en comptent déjà 20 000. Par ailleurs, depuis le début de l’année, les forces de l’ordre peuvent aussi compter sur le renfort des Vietnamiens eux-mêmes, qui sont incités à dénoncer anonymement les infractions à la route de leurs concitoyens. En échange de quoi, ils peuvent recevoir jusqu’à 10% du montant de l’amende. Parier sur la cupidité de la population pour compenser la baisse des déplances publiques. Voilà donc l’équation.
Ce n’est pas la première fois que le Vietnam licencie ainsi des fonctionnaires
Non, à la fin des années 80, le pouvoir avait déjà remercié plus d’un million d’agents. Et pour cause, la planification soviétique n’avait pas apporté la croissance escomptée. Depuis, Hanoï n’a cessé d’encourager l’économie de marché et les investissements étrangers. Et ce, tout en maintenant, je cite, « une orientation socialiste ». Un système hybride, donc, un peu à l’image du grand frère chinois.
Par Marie Boëton – Radio France Inter – 17 février 2025