Le Vietnam sanctionne son système bancaire : Bitcoin tient bon
Depuis le 1er septembre 2025, plus de 86 millions de comptes ont commencé à être fermés au Vietnam, faute d’authentification biométrique. Pour les autorités, c’est une réponse à la fraude et au blanchiment. Mais pour de nombreux observateurs, cette vague de fermetures démontre aussi la fragilité d’un système bancaire centralisé et relance le discours sur l’intérêt de Bitcoin.
Une fermeture massive et immédiate
D’après les médias locaux, le pays comptait environ 200 millions de comptes bancaires. Sur ce total, 113 millions ont été validés avec les nouvelles exigences biométriques, tandis que 86 millions jugés non conformes ont été placés sur la sellette.
Depuis le 1er septembre, ces comptes sont progressivement bloqués. Les clients ont jusqu’à la fin du mois pour se mettre à jour, sous peine de voir leurs fonds inaccessibles.
Les autorités s’appuient sur une loi adoptée en juillet qui impose l’authentification faciale comme condition pour ouvrir, maintenir ou utiliser un compte.
Les établissements bancaires se conforment au calendrier officiel, en appliquant la clôture aux profils inactifs ou non vérifiés. Dans les faits, il s’agit d’un tri massif qui modifie la structure même du secteur bancaire vietnamien.
La mesure ne se limite pas aux comptes dormants. Les opérations en ligne dépassant 10 millions de dongs (environ 390 $) nécessitent désormais une validation biométrique. Les transactions cumulées franchissant les 20 millions de dongs (758 $) sont également soumises à ce contrôle. Le seuil reste bas et concerne une part importante des transferts quotidiens.
Une réforme motivée par la fraude numérique
Les autorités expliquent cette réforme par la montée en puissance des fraudes liées à l’intelligence artificielle. En mai dernier, la police vietnamienne a démantelé un réseau utilisant des visages générés par IA pour contourner les systèmes de sécurité.
Le groupe avait blanchi près de 39 millions de dollars via des faux comptes. L’affaire a convaincu le régulateur que les contrôles traditionnels n’étaient plus suffisants. La Banque d’État du Vietnam a ainsi défini un nouveau standard. Chaque client doit réaliser une authentification faciale initiale, puis renouveler la vérification pour les transactions sensibles.
Les banques ont intégré ces obligations dans leurs applications mobiles, imposant un selfie dynamique lors des virements importants, lors d’une première connexion ou d’un changement d’appareil.
Cela vise à renforcer la confiance dans le système de paiement. Mais elle crée aussi des contraintes inédites. Plusieurs expatriés expliquent avoir dû se rendre physiquement dans le pays pour valider leur compte, faute de solution à distance. Sans biométrie enregistrée en personne, leurs comptes étaient menacés de clôture définitive.
Des conséquences contrastées pour les clients
Selon des responsables du secteur, la majorité des Vietnamiens actifs n’ont pas rencontré de difficulté particulière. La plupart ont déjà réalisé leur enregistrement biométrique, encouragés par les banques depuis plusieurs mois. Les personnes les plus touchées sont les étrangers ayant quitté le pays ou les détenteurs de comptes rarement utilisés.
Pour ces derniers, la situation est complexe. Lier un compte à une carte SIM locale ou recevoir un code OTP devient insuffisant. L’étape biométrique impose une présence sur place. Certains comptes risquent donc de rester bloqués faute de mise à jour. Pour l’instant, il n’existe pas de procédure claire garantissant la récupération des fonds en cas de fermeture définitive.
Le gouvernement présente l’opération comme un “nettoyage” nécessaire. Les années de forte croissance du sans-cash ont entraîné la création massive de comptes, dont une partie n’a jamais été correctement vérifiée. La réforme permet de réduire ces doublons et d’aligner les pratiques bancaires sur un standard de sécurité jugé plus robuste.
Bitcoin présenté comme alternative
Dans la communauté crypto, cette décision est interprétée différemment. Plusieurs commentateurs rappellent que des épisodes similaires ont déjà eu lieu dans d’autres pays, du Liban à l’Inde en passant par le Nigeria ou Chypre. Pour eux, l’affaire vietnamienne illustre une fois de plus la dépendance des citoyens vis-à-vis d’un système centralisé qui peut changer les règles du jour au lendemain.
Des figures comme Marty Bent ou Daniel Batten insistent sur le contraste avec Bitcoin. Selon eux, un utilisateur qui conserve ses fonds en auto-garde n’a pas à craindre une obligation soudaine de vérification biométrique ou une fermeture de compte arbitraire. Bitcoin offrirait une protection contre ce type d’ingérence, car il est indépendant.
Mais cette indépendance repose sur la capacité des individus à gérer leurs propres clés et à sécuriser leurs avoirs. Si le protocole échappe au contrôle d’un État les plateformes d’échange, restent soumis aux réglementations locales. Autrement dit, Bitcoin réduit le risque de blocage, mais il n’élimine pas les contraintes légales.
Par Lucie Moinet – Icobench.com – 19 septembre 2025
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