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Au Cambodge, l’extraction de sable fait disparaître le grand lac Tonlé Sap

Au Cambodge, l’extraction massive de sable dans le Mékong n’est pas sans conséquences pour le fleuve, et celles-ci se répercutent sur le lac voisin, le Tonlé Sap. Les scientifiques sonnent l’alarme.

La demande mondiale de sable explose et, avec elle, la pression sur le lac Tonlé Sap, le plus grand lac d’eau douce situé en Asie du Sud-Est, s’intensifie. L’extraction de cette ressource naturelle, la deuxième plus exploitée après l’eau, modifie « considérablement » le cours du Mékong.

À la longue, son exploitation, pour fabriquer du béton, du verre ou des remblais, pourrait par conséquent réduire la superficie du lac Tonlé Sap, l’un des habitats naturels et des lieux de pêche les plus importants de cette région du Cambodge. Dans la revue Science, Brian Eyler, spécialiste des politiques de l’eau au Stimson Center (Washington), explique que le problème du dragage dans cette zone a « déjà été documenté, mais il reste incompris ».

Dans une nouvelle étude, ses collègues et lui mettent en exergue les conséquences de ces prélèvements sur le Tonlé Sap, avec l’espoir que cette situation alarmante recevra enfin « l’attention qu’elle mérite ».

Les activités humaines mises en cause par des rapports

Long de plus de 140 km, le Tonlé Sap a une particularité hydrologique unique au monde. Relié au Mékong par l’émissaire du même nom, le lac se vide en saison sèche et se remplit en saison des pluies lorsque le courant du Mékong s’inverse. Lors de la crue, le Tonlé Sap s’étend jusqu’à six fois sa surface normale et augmente son volume jusqu’à 80 000 kilomètres cubes.

En outre, le lac abrite environ 1 400 espèces de poissons, dont un quart sont uniques, et des espèces rares d’oiseaux. « C’est probablement le système le plus diversifié au monde pour les poissons migrateurs d’eau douce », explique Alice Hughes, biologiste spécialiste de la conservation à l’université de Melbourne.

Mais voilà que depuis les années 2000, cette fluctuation saisonnière s’affaiblit. Les scientifiques Wen Xin Ng et Edward Park ont montré en 2021 que le changement climatique et les barrages ne suffisaient pas à expliquer cette baisse. Le vrai coupable serait le dragage du sable dans le Mékong près de Phnom Penh. En creusant le lit de la rivière, ces activités empêchent l’eau de remonter assez haut, réduisant la circulation inverse qui alimente le Tonlé Sap.

Dans moins de 15 ans, une diminution de sa taille de 40% ?

La nouvelle étude publiée par l’équipe de chercheurs confirme ce lien. Ces derniers ont combiné des données sur le dragage, la profondeur et les niveaux des eaux dans un modèle hydrologique. Les résultats montrent « une relation claire entre l’abaissement du lit du fleuve du Mékong causé par le sable et les changements vécus par Tonlé Sap ». Selon leurs simulations, si rien n’est fait, la crue pourrait chuter de 69 % d’ici 2038, la taille du lac diminuer de 40 % et les débits en saison sèche chuter de 59 %. La seule solution est « d’arrêter et d’inverser l’abaissement du lit du fleuve ».

Le Cambodge et le Vietnam ont interdit l’exportation de sable, mais cela n’empêche pas le dragage pour répondre à la demande interne. Au-delà du Tonlé Sap, c’est tout un équilibre écologique et des millions de personnes qui se nourrissent de ses ressources qui sont menacés.

Par Elodie Falco – Géo Magazine – 22 novembre 2025

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