« Très heureux »: près de 2000 couples LGBT+ se marient en Thaïlande, pionnière en Asie du Sud-Est
Larmes, baisers et drapeau arc-en-ciel: près de 2000 couples LGBT+ se sont dit « oui » en Thaïlande jeudi, à l’entrée en vigueur de la loi autorisant le mariage entre personnes de même sexe, pionnière en Asie du Sud-Est.
« Aujourd’hui, c’est un jour exceptionnel. Nous avons le droit d’aimer, comme les autres », sourit auprès de l’AFP Sappanyoo Panatkool, 38 ans, après avoir épousé son partenaire Apiwat Apiwatsayree, 49 ans, qui a essuyé une larme au cours de la cérémonie.
Les deux acteurs, aux costumes beiges assortis, figurent parmi les premiers couples qui ont reçu des autorités leur certificat de mariage, bordé de rose.
La Thaïlande est devenue le troisième territoire asiatique à reconnaître le mariage pour tous, après Taïwan et le Népal. Seule une quarantaine de pays dans le monde ont franchi le pas, depuis les Pays-Bas en 2001.
« Nous sommes tellement heureuses. Nous attendons ce jour depuis 10 ans », a déclaré Thanaphon Chokhongsung, 59 ans.
Cette Thaïlandaise s’est unie avec sa partenaire Sumalee Sudsaynet, 64 ans, dans un arrondissement de la capitale Bangkok au nom évocateur: Bang Rak, « rak » voulant dire « amour » en thaï.
Des célébrations de masse ont aussi eu lieu dans la salle des congrès de l’un des plus grands centres commerciaux de Bangkok, où des fonctionnaires se sont installés pour gérer l’afflux de demandes, dans une ambiance festive.
Consensus
Des dizaines de couples, certains en costume traditionnel, ont rempli les lieux. Le kaki de l’uniforme d’un policier s’est mêlé à cette foule bariolée.
« Nous sommes très heureux. Nous n’avons plus à nous inquiéter de l’avenir de notre partenaire si quelque chose arrive à l’un d’entre nous », s’est réjoui Pisit Sitihirunchai, le membre des forces de l’ordre, qui s’est uni avec Chanatip, employé d’une ONG.
La nouvelle loi sur le mariage, promulguée par le roi Maha Vajiralongkorn en septembre, ne comporte plus de références genrées et confère aux couples homosexuels les mêmes droits en matière d’héritage, de propriété ou d’adoption qu’aux couples hétérosexuels.
Le mariage gay suscite un consensus rare en Thaïlande, dans un contexte de polarisation croissante entre le bloc conservateur favorable à l’armée et au roi, et l’opposition progressiste soutenue par les jeunes générations.
Le royaume bouddhique bénéficie depuis longtemps d’une réputation de tolérance envers les minorités sexuelles et de genre, qui attire des touristes de pays voisins conservateurs.
L’homosexualité est illégale dans la moitié des pays d’Asie, et peut entraîner une peine de prison de plusieurs années, comme en Birmanie ou en Malaisie, frontaliers de la Thaïlande, a relevé en 2020 un rapport de l’Association internationale des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans et intersexes (Ilga).
Discriminations
« Aujourd’hui, le drapeau arc-en-ciel flotte fièrement au-dessus de la Thaïlande », a écrit la Première ministre Paetongtarn Shinawatra, sur X.
« Cette loi sur l’égalité devant le mariage marque le début d’une plus grande prise de conscience de la société thaïlandaise sur la diversité des genres », a poursuivi la dirigeante, actuellement en Suisse pour le Forum de Davos.
La loi reste associée à son prédécesseur Srettha Thavisin, issu du même parti, Pheu Thai, qui a accéléré le processus législatif, jusqu’à sa destitution en août.
L’instabilité chronique de la vie politique thaïlandaise, entre coups d’Etat et grandes contestations populaires, avait eu raison de précédentes tentatives d’autoriser le mariage pour tous par le passé.
« Récemment, le dirigeant d’un pays a dit qu’il n’y avait que deux genres. Mais je pense qu’on est plus ouverts d’esprit que ça », a déclaré Srettha, dans une allusion au président américain Donald Trump qui a signé lundi après son investiture un décret limitant à deux, « masculin » et « féminin », les genres reconnus par l’Etat fédéral.
Malgré cette avancée sur le mariage, les personnes transgenres ou non-binaires n’ont toujours pas le droit de faire modifier la mention de leur sexe sur leurs documents d’identité en Thaïlande, prochain combat à remporter pour les militants des droits LGBT+ locaux.
« Les personnes qui ne s’identifient pas à leur sexe biologique sont comme des SDF », a déclaré Ploynaplus Chirasukon, qui a épousé à Bangkok sa partenaire de longue date. « La possibilité de changer de sexe à l’état civil permettrait une véritable égalité. »
Agence France Presse – 23 janvier 2025
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