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En Thaïlande, la monarchie utilise la loi pour museler les écrivains

En Thaïlande, la critique du pouvoir peut facilement mener à une procédure judiciaire, quand la loi punissant la diffamation et le crime de lèse-majesté reste à disposition des autorités. De nombreux écrivains, et notamment des poètes, font les frais de cette législation autoritaire.

L’article 112 du Code pénal thaïlandais considère l’insulte à l’encontre de la monarchie comme un crime, passible d’une peine de prison pouvant atteindre 15 années… Couplée aux articles punissant la diffamation, cette loi permet aux autorités de réprimer les voix dissidentes.

En 2020, des manifestations citoyennes sont venues remettre en cause le régime monarchique, actuellement représenté par Rama X. Ces mouvements prodémocratie se sont heurtés à une forte répression, motivée cette fois aussi par le fameux article 112.

Preuve par le triste exemple

Une des figures de cette contestation, l’avocat et poète Arnon Nampha, accusé de 11 crimes de lèse-majesté pour sa participation aux mouvements, en 2020. D’autres écrivains sont concernés par la répression, comme Parit “Penguin” Chiwarak, poète, qui s’est lancé depuis le mois de mars dernier dans une grève de la faim. Et ce, afin d’obtenir une libération sous caution, pour lui-même et tous les coupables de crime de lèse-majesté. 

Les membres de la famille royale, bien conscients de disposer des ressources financières et des outils juridiques nécessaires, n’hésitent pas à porter des affaires devant les tribunaux civils. M.R. Priyanandana Rangsit, petite-fille de Rangsit Prayurasakdi, qui fut régent de Thaïlande entre 1946 et 1951, a ainsi intenté un procès au chercheur thaïlandais Nattapoll Chaiching et son éditeur Fa Diew Kan. Elle réclamait 1,5 million $ pour une information qu’elle estimait erronée, relayée dans un article de recherche mais supprimée du livre publié par l’éditeur.

L’organisation PEN International, qui défend la liberté d’expression des écrivains dans le monde, se dit « troublée par la persistance du gouvernement thaïlandais dans l’usage des lois pénales sur la diffamation contre des manifestants pacifiques qui ont publiquement critiqué le régime monarchique du pays. Nous appelons les autorités à abroger la loi thaïlandaise très problématique sur le crime de lèse-majesté et à abandonner immédiatement toutes les charges retenues contre les personnes jugées pour avoir exprimé de manière pacifique leurs opinions. »

Amnesty International, pour sa part, dénonce l’usage de la force par les autorités lors des manifestations pacifiques du mois de mars dernier.

« Le recours persistant et fréquent des autorités thaïlandaises à des manœuvres d’intimidation est une atteinte flagrante aux droits des personnes de faire état de leurs opinions et de manifester pacifiquement. Près d’un an après que le gouvernement thaïlandais a décrété l’état d’urgence [le 26 mars 2020, NdR] en réaction au mécontentement croissant, mais pacifique à travers le pays, le tableau est sombre : 383 personnes, notamment 13 mineures, sont visées par des accusations forgées de toutes pièces, pour s’être simplement rassemblées et exprimées », explique Emerlynne Gil, directrice régionale adjointe pour la recherche à Amnesty International. 

Par Antoine Oury – Actualitte.com – 21 avril 2021

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