Cambodge: arrestation d’une vendeuse en ligne accusée de pornographie
Au Cambodge, une vendeuse de produits en ligne sur Facebook a été arrêtée. Son tort : avoir fait la promotion de ses produits d’une manière « trop sexy » et en contradiction avec les valeurs cambodgiennes selon les autorités.
Elle est accusée d’exhibition sexuelle et de production de pornographie.
Sur la page de sa boutique sur Facebook, Ven Rachna vend des robes, des sacs à main, mais surtout de la lingerie. Ambiance boudoir, souvent en petite tenue, voire partiellement dénudée, ses publications ne sont pourtant pas censurées par Facebook.
Les autorités cambodgiennes ont néanmoins décidé de mettre un terme à ses publications jugées « trop sexy ». Ven Rashna est arrêtée une première fois mercredi dernier pour être « éduquée ».
La vidéo d’excuses publiques de Ven Rashna, a été enregistrée et publiée mercredi dernier par la police municipale de Phnom Penh. Elle présente ses excuses pour des photos qui porteraient « atteinte à l’honneur des femmes cambodgiennes » et déshonoreraient « les traditions khmères ». La vendeuse promet aussi de ne plus diffuser de telles photos.
Pourtant, à peine sortie du commissariat, elle publie de nouveau sur sa page Facebook et cette fois-ci, elle est arrêtée pour de bon. Ven Rashna fait désormais face à la justice pour exhibition sexuelle et production de pornographie. Elle encourt plus d’un an de prison.
Lutter contre les crimes en ligne
Cette affaire fait suite à un discours du Premier ministre cambodgien. Lundi 17 février, Hun Sen se tient devant le Conseil National pour les Femmes du Cambodge. Ce jour-là, il demande aux autorités de lutter contre les crimes en ligne qui selon lui affectent les valeurs morales de la société. « Vous vendez des produits, pas vos seins », déclare-t-il au sujet des boutiques en ligne.
Cependant, alors que certains épinglent un discours patriarcal, les critiques au Cambodge sont mitigées. Sur Facebook, de nombreux commentaires en lien avec le cas, très médiatisé, de Ven Rashna soutiennent les mesures prises par le gouvernement. Le Cambodge est un pays aux mœurs conservatrices.
Sans avoir de valeur légale, une sorte de code de conduite pour les femmes, le plus que centenaire « Chbab Srey », influence encore la représentation de la femme au Cambodge. Sept organisations cambodgiennes de défense des droits des femmes ont néanmoins réagi dans une lettre ouverte comme le CCHR (Cambodian Center for Human Rights).
CCHR joins with other organizations in an open letter to Prime Minister Hun Sen appealing for respect for women’s rights to #selfdetermination, #expression and #bodilyintegrity. The culture of #victimblaming perpetrates violence against women and gender-based #discrimination. pic.twitter.com/8JlOY3JSJh CCHR Cambodia (@cchrcambodia) February 19, 2020
L’organisation conclut : « Plutôt qu’un remède, punir les femmes pour leur choix vestimentaire est l’une des causes principales des violences [à caractère sexistes] ».
Chak Sopheap, directrice du Centre Cambodgien des Droits Humains et l’une des signataires de la lettre, indiquait sur Twitter, ce dimanche, comprendre les réactions hostiles à sa prise de position.« Respecter les différentes opinions qui font la beauté de la démocratie », explique Chak Sopheap. Mais, elle défend également la nécessité de se battre pour l’égalité des droits et notamment l’égalité des genres.
Le directeur régional d’Amnesty International a également critiqué des mesures allant contre la liberté d’expression ou l’égalité des genres et a demandé l’abandon des charges pesant contre Ven Rashna.
Par Juliette Buchez – Radio France Internationale – 24 février 2020
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