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Brusque prise de conscience en Birmanie

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Le manque de moyens alloués à la santé pourrait expliquer le faible nombre de cas de Covid-19 détectés dans le pays, qui a finalement décidé de se préparer à l’arrivée de l’épidémie.

Fini les déclarations lénifiantes du gouvernement birman. Depuis lundi et l’annonce des deux premiers cas – importés – de coronavirus dans ce pays de 54 millions d’habitants, les autorités ont changé de discours et musclé leurs réponses sanitaires pour parer à la propagation du virus. Jusqu’alors, elles se bornaient à répéter que le pays ne comptait aucun cas positif, malgré ses 2 200 kilomètres de frontières poreuses avec le Bangladesh, l’Inde, la Chine, la Laos et la Thaïlande. Elles avaient seulement suspendu des vols aériens, reporté des cérémonies publiques et instauré un début de confinement.

Sans craindre le ridicule, le porte-parole du gouvernement, Zaw Htay, n’avait pas hésité à expliquer, le 14 mars, que cette singularité était due au «mode de vie et à l’alimentation des citoyens de Birmanie [qui] sont bénéfiques contre le coronavirus», rappelant que le pays avait déjà été «relativement épargné par le Sras» en 2002-2003. «La Birmanie ne partage pas les coutumes de salutation par des poignées de main, des embrassades ou des baisers des pays occidentaux, poursuivait-il. Elle n’a pas non plus un nombre élevé d’utilisateurs de cartes de crédit, car la personne qui manipule ces cartes au comptoir est en contact étroit avec des centaines d’autres.» En plus de cet argumentaire discutable, d’autres voix vantaient les mérites prophylactiques de la religion bouddhiste.

Vendredi soir, le ministère birman de la Santé comptait 5 cas positifs et «324 personnes suspectes», surtout répertoriés dans les hôpitaux de Rangoun et Mandalay. «On touche du bois, pour l’instant, il ne s’agit pas d’une explosion de l’épidémie», note un consultant joint à Rangoun qui déplore «le manque d’investissements et d’engagement de l’Etat depuis des décennies». Les dépenses publiques de santé sont passées de 0,2 % du PIB en 2009 à 1,17 % en 2018. De nombreux services sanitaires sont encore gérés par des bénévoles et des ONG. Cette faiblesse des moyens et le sous-équipement font craindre une épidémie majeure. Ils pourraient également expliquer le petit nombre de Covid-19 répertoriés – environ 320 tests ont en effet été effectués dans le pays, selon le centre de santé d’urgence. Depuis le 20 février, la Birmanie dispose de machines pour analyser ces tests et n’est plus obligée d’envoyer ses échantillons en Thaïlande. Singapour, la Chine, le Japon, les Etats-Unis mais aussi l’Organisation mondiale de la santé et la Banque asiatique de développement sont venus en aide à Naypyidaw ces derniers jours.

Mardi, dans une allocution très maternaliste, la Première ministre, Aung San Suu Kyi, a appelé au calme. A l’annonce des premiers cas, des scènes de razzia dans les commerces et de panique dans la population avaient été constatées.

L’une des grandes incertitudes concerne l’état de santé des milliers de travailleurs migrants revenus dans leurs villages, depuis le week-end dernier, en provenance de Thaïlande où l’état d’urgence a été instauré et des centaines de cas positifs confirmés. Mais cette inquiétude est sans commune mesure avec la situation des musulmans rohingyas réfugiés au Bangladesh voisin. Ils sont plus d’un million dans le sud du pays à vivre dans une promiscuité qui fait redouter une catastrophe sanitaire.

Par Arnaud Vaulerin – Libération – 27 mars 2020

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