Amnesty International brosse un tableau amer des libertés dans le royaume
A la veille d’une série de procès d’environ 150 personnes affiliées au Parti national de sauvetage du Cambodge (CNRP), interdit, le directeur régional Asie-Pacifique d’Amnesty International, Yamini Mishra, a déclaré : « Ces procès de masse sont un affront aux normes internationales en matière de procès équitable, aux engagements du Cambodge en matière de droits de l’homme et à l’État de droit ».
Nous reproduisons ici un communiqué d’Amnesty International
« Cette avalanche d’affaires est l’aboutissement d’une campagne de persécution implacable contre l’opposition politique cambodgienne et d’autres voix dissidentes a -t-il poursuivi. « L’histoire récente du Cambodge suggère que les accusés ont de faibles espoirs de bénéficier d’un procès équitable. Lorsqu’il s’agit d’affaires contre des militants de l’opposition et des critiques du gouvernement, les motivations politiques l’emportent systématiquement sur les faits et le droit.
« Le fait que des hommes politiques de l’opposition se soient vu refuser l’entrée au Cambodge pour défendre les accusations portées contre eux révèle ces procès-spectacles cyniques pour ce qu’ils sont. Toutes les personnes emprisonnées au Cambodge pour des motifs politiques devraient être libérées immédiatement et sans condition, et toutes les accusations à motivation politique devraient être abandonnées sans délai.
« Toute personne, quelles que soient ses convictions politiques, a le droit de prendre part aux affaires publiques, de s’associer avec d’autres et de se réunir pacifiquement. Le Cambodge doit mettre fin à la répression implacable de la dissidence pacifique et assurer la diversité des voix dans la sphère publique ».
Contexte
Selon les informations reçues par Amnesty International, le tribunal municipal de Phnom Penh tiendra des audiences de première instance dans six affaires à motivation politique impliquant environ 150 accusés affiliés au CNRP sur quatre dates : 14 janvier, 22 janvier, 29 janvier et 4 mars. Les accusés sont des hommes politiques, des militants et des sympathisants du CNRP, notamment des dirigeants de haut niveau du parti tels que Sam Rainsy, Mu Sochua, Ho Vann et Eng Chhai Eang. Plusieurs politiciens du CNRP sont accusés dans plus d’une de ces affaires.
Les accusations varient dans chaque cas et comprennent respectivement le « complot », « l’incitation à commettre un crime », « l’incitation du personnel militaire à la désobéissance » et la « tentative criminelle » en vertu des articles 453, 494, 495 ,471, et 451 du code pénal. De nombreuses accusations sont liées au retour prévu au Cambodge, en novembre 2019, des dirigeants du CNRP qui se sont exilés. La « tentative criminelle » est passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 30 ans.
Depuis 2017…
Depuis 2017, le CNRP fait face à des accusations à motivation politique selon lesquelles il serait de connivence avec le gouvernement des États-Unis pour fomenter une soi-disant « révolution de couleur », qualifiée de coup d’État par les autorités cambodgiennes. Cette accusation est à l’origine de la dissolution arbitraire du CNRP par la Cour suprême en novembre 2017, qu’Amnesty International a qualifiée d' »acte flagrant de répression politique » et de violation grave de la liberté d’association.
Des centaines de militants et de sympathisants du CNRP ont été arbitrairement arrêtés et détenus et font depuis lors l’objet d’accusations pénales à motivation politique. De nombreux militants du CNRP ont été physiquement attaqués et blessés par des agresseurs inconnus au cours de cette période, sans qu’aucune enquête crédible sur ces attaques n’ait été menée à ce jour.
Le 8 janvier, un porte-parole du gouvernement cambodgien a déclaré à Radio Free Asia que les autorités n’accorderaient pas de documents de voyage aux hommes politiques du CNRP vivant à l’étranger qui prévoyaient de revenir au Cambodge pour faire face aux accusations portées contre eux.
Le Cambodge est un État partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui garantit le droit à la liberté d’association en vertu de l’article 22 et le droit de participer aux affaires publiques en vertu de l’article 25.
Gavroche-thailande.com – 14 janvier 2021
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