Viêt-Nam. Une femme et son fils injustement condamnés à l’issue d’une parodie de justice
Réagissant à la condamnation de Can Thi Theu et de Trinh Ba Tu, deux militants de premier plan en faveur du droit à la terre, Emerlynne Gil, directrice régionale adjointe pour la recherche à Amnesty International, a déclaré :
« Cette condamnation est une parodie de justice. Can Thi Theu et son fils, Trinh Ba Tu, sont deux courageux défenseurs des droits humains qui doivent être protégés par le gouvernement vietnamien, et non harcelés et enfermés.
« Can Thi Theu et Trinh Ba Tu n’auraient jamais dû être arrêtés, et encore moins déclarés coupables de fausses accusations. Ils sont manifestement punis en représailles des activités pacifiques militantes qu’ils mènent pour dénoncer les injustices et les violations des droits humains. Malheureusement, au Viêt-Nam, défendre pacifiquement les droits humains suffit pour être condamné à une longue peine de prison.
« Les autorités vietnamiennes doivent annuler sans délai cette condamnation injuste et libérer Can Thi Theu et Trinh Ba Tu immédiatement et sans condition. Ils ont été condamnés uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits humains. Les autorités vietnamiennes doivent libérer toutes les personnes qui sont injustement emprisonnées au Viêt-Nam. »
Complément d’information
Can Thi Theu et Trinh Ba Tu ont tous deux été condamnés à huit ans d’emprisonnement suivis de trois ans de mise à l’épreuve, après avoir été déclarés coupables de « fabrication, stockage ou diffusion d’informations, de documents ou d’articles dans le but de s’opposer à l’État de la République socialiste du Viêt-Nam » par le tribunal populaire de la province de Hoa Binh ce mercredi 5 mai.
Can Thi Theu est une militante du droit à la terre et une défenseure des droits humains très connue au Viêt-Nam. Ses activités militantes ont débuté après la saisie des terres de sa famille par les autorités en 2010. Elle a commencé à dénoncer les expulsions forcées et est devenue une figure de premier plan du mouvement de défense du droit à la terre.
En 2014, Can Thi Theu et son mari, Trinh Ba Khiem, ont été appréhendés alors qu’ils filmaient une expulsion forcée. Ils ont ensuite été déclarés coupables par le tribunal populaire du district de Ha Dong. Can Thi Theu a été condamnée à 15 mois d’emprisonnement et son mari à 18 mois d’emprisonnement. Ils ont tous deux été poursuivis pour « actes d’opposition commis à l’encontre d’une personne exerçant une fonction publique » au titre de l’article 257 du Code pénal de 1999.
En juin 2016, Can Thi Theu a été arrêtée à nouveau pour avoir organisé une manifestation pacifique au bureau du Comité central des citoyens, afin de demander justice pour les personnes dont les terres avaient été saisies. Elle a été jugée en septembre 2016 par le tribunal populaire du district de Dong Da et condamnée à un an et huit mois de prison pour « actes d’opposition commis à l’encontre d’une personne exerçant une fonction publique », au titre de l’article 257 du Code pénal de 1999.
Après l’incarcération de Can Thi Theu et de son mari Trinh Ba Khiem, leurs fils Trinh Ba Tu et Trinh Ba Phuong ont à leur tour commencé à militer et à défendre les droits humains. Ils sont devenus des figures de proue du mouvement de défense du droit à la terre pendant que leurs parents étaient en prison. Une fois libérée, Can Thi Theu a poursuivi ses activités militantes en faveur du droit à la terre avec ses fils.
En janvier 2020, la police a fait une descente dans le village de Dong Tam, près de Hanoi. Lors d’un affrontement, un chef de village âgé de 84 ans et trois policiers ont été tués. Les autorités ont également arrêté des dizaines de villageois en lien avec le conflit foncier très médiatisé entre les pouvoirs publics et la population locale. Can Thi Theu et ses deux fils, Trinh Ba Tu et Trinh Ba Phuong, ont joué un rôle de premier plan en informant le grand public de ces événements sur les réseaux sociaux.
Le 24 juin 2020, la police a arrêté Can Thi Theu, Trinh Ba Phuong et Trinh Ba Tu. Ils ont tous trois été inculpés de « fabrication, stockage ou diffusion d’informations, de documents ou d’articles dans le but de s’opposer à l’État de la République socialiste du Viêt-Nam » au titre de l’article 117 du Code pénal. Trinh Ba Phuong est toujours en détention provisoire.
Amnesty International – 5 mai 2021
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