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Au Cambodge, les indépendants enfin couverts par l’assurance maladie

Longtemps laissés à la marge du système social cambodgien, les employés du secteur informel bénéficient depuis novembre de la santé quasi gratuite.

Dans la queue de la pharmacie de l’hôpital Calmette de Phnom Penh, la capitale cambodgienne, Vanthara ne cache pas sa joie. Après des années à payer de sa poche pour ses soins de santé, ce chauffeur de tuktuk de 34 ans s’apprête à utiliser sa carte d’assurance maladie pour la deuxième fois de sa vie.  C’est formidable,  s’exclame-t-il. Hier je suis allé chez le médecin et aujourd’hui je passe récupérer les médicaments prescrits. Dans les deux cas, je ne paye rien. C’est un sacré changement ! .

Une avancée sociale saluée

Depuis mi-novembre 2023, l’assurance maladie cambodgienne s’est ouverte aux employés du secteur informel, qui représentent plus de 70 % des actifs du pays. Alors que les fonctionnaires et employés du privé jouissent d’une couverture maladie depuis une dizaine d’années, des millions de chauffeurs de tuktuk, vendeurs ambulants, femmes au foyer ou encore agriculteurs n’avaient jusqu’alors pas accès à la gratuité des soins.

L’avancée sociale est saluée par la population.  L’année dernière, mon mari a eu une infection à la jambe. Le diagnostic et le traitement nous ont coûté 1 500 dollars,  déplore Kimsron, une vendeuse du vieux marché. Désormais c’est révolu : dès qu’on a appris que nous pouvions avoir cette carte, nous l’avons demandée. 

Pour les indépendants, l’assurance maladie n’est pas obligatoire. Ceux qui souhaitent en bénéficier doivent payer 15 600 riels tous les mois (environ 3,50 €) sur une application mobile dédiée. En échange, ils ont accès à un panel de soins gratuits dispensés dans tous les hôpitaux publics du pays et dans les cliniques privées partenaires. Une indemnité de maternité est également accessible aux femmes enceintes.

Un système social encore fragile

La mesure semble populaire : depuis l’ouverture du service il y a quatre mois, quelque 170 000 personnes ont demandé à recevoir leur « carte vitale ».  Les bénéficiaires sont principalement localisés à Phnom Penh. On voit également une majorité de femmes , note Heng Sophhanarith, directeur adjoint du National Social Security Fund (NSSF), la  sécu  cambodgienne.

Si l’avancée sociale est largement saluée, son efficacité se heurte aux déserts médicaux dans les campagnes.  Je n’ai pas pris l’assurance maladie car j’habite à 200 kilomètres de la ville,  dit Sophorn dans la salle d’attente d’un hôpital phnompenhois. Je préfère payer une fois de temps en temps pour me soigner que de devoir payer tous les mois .

Autre limite : certaines pathologies, comme les soins dentaires, certains actes chirurgicaux ou la transplantation d’organes, ne sont pas encore prises en charge. Ces soins sont jugés trop onéreux pour un système social encore fragile. Les indépendants de plus de 60 ans sont également exclus du système.

 Ce n’est pas encore parfait, mais c’est une première étape,  reconnaît Sophhanarith. Après une première année d’expérimentation, nous ferons le bilan et verrons comment améliorer le système. La limite d’âge pourrait être levée et l’assiette de soins, élargie. 

Par François Camps – Ouest-france.fr – 13 mars 2024

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