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En Thaïlande, des “moines voyous” s’adonnent au braconnage

Plusieurs religieux, dont certains à la tête de monastères, ont été arrêtés en Thaïlande pour braconnage. Indignée, une chroniqueuse du “Bangkok Post” dénonce un “marché de la superstition”. Et somme le clergé bouddhiste de remettre de l’ordre dans ses rangs.

Par le passé, des “moines voyous”, comme les appelle le Bangkok Post, ont fait les gros titres des journaux alors qu’ils trempaient dans des affaires de mœurs ou de corruption. “Ces scandales ne sont plus d’actualité”, note la chroniqueuse Sanitsuda Ekachai. Ce n’est pas pour autant que ces hommes, censés incarner l’exemplarité, sont devenus irréprochables. Plusieurs d’entre eux ont ainsi récemment pris part à des activités de braconnage d’animaux sauvages.

“Et il ne s’agit pas de simples moines, reprend la journaliste. Ce sont des supérieurs, qui exercent un pouvoir absolu sur leurs temples et suscitent la vénération de la population locale.”

Le 26 avril, un groupe de rangers qui patrouillait dans le sanctuaire de Phu Khieo, dans la province de Chaiyaphum, au nord de Bangkok, sont tombés nez à nez avec neuf braconniers. Surpris, ces derniers ont ouvert le feu sur les rangers. “Un moine et un novice ont été arrêtés sur place avec des carcasses, dont des cornes de gaur [un imposant cervidé menacé de disparition]”, précise le Bangkok Post.

Mais d’autres ont réussi à prendre la fuite, dont Phra Srisajjayanmuni, le supérieur du temple Huai Hin Fon, et d’autres religieux. Ils se sont défendus, explique le journal, en assurant effectuer un pèlerinage dans la forêt pour rendre hommage aux esprits des animaux sauvages.

Un clergé complice

Un mois plus tard, un autre moine supérieur, de Nakhon Ratchasima cette fois, a été inculpé pour possession d’une grande quantité de restes d’animaux sauvages, possiblement pour les revendre sous forme d’amulettes.

“À la suite de plaintes déposées par des villageois, des gardes forestiers ont perquisitionné le domicile de Phra Kittichai Woradhammo le 28 mai”, écrit le Bangkok Post. Des restes de plusieurs animaux appartenant à des espèces protégées ont été découverts, dont certains stockés dans des congélateurs. Une tête de gaur, des saros (des caprins asiatiques), des pattes d’ours et un cerf y ont été trouvés. Le suspect a réussi à prendre la fuite et est toujours en cavale.

Ces scandales à répétition, estime Sanitsuda Ekachai, devraient être l’occasion pour le clergé d’expliquer la place centrale des moines dans la protection des forêts et de la faune, conformément aux enseignements de Bouddha. “Après tout, Bouddha est né, a atteint l’illumination et a quitté cette terre dans la forêt”, écrit la chroniqueuse.

Au lieu de cela, s’indigne-t-elle, le clergé, “isolé dans son cocon et coupé de la société”, s’emmure dans le silence. Avec toujours la même excuse, à savoir que ces “moines voyous” ne sont qu’une exception qui ne reflète pas l’ensemble des religieux. “C’est tout simplement affligeant. Le clergé n’est pas une partie du problème. C’est lui le problème” lorsqu’il échoue à remettre ces moines dans le droit chemin, martèle-t-elle. “En toute impunité, la situation s’aggrave de jour en jour, les moines devenant des fraudeurs, voire des braconniers, tandis que les temples se transforment en marchés de la superstition.”

Courrier international – 6 juin 2024

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