Un nouvel avenir s’offre à Siem Reap
Frappée par la crise liée à la pandémie, Siem Reap doit préparer son avenir, transformer sa stratégie et s’orienter vers un tourisme de qualité, axé sur sa nature riche et son patrimoine culturel.
La ville de Siem Reap, dont le tourisme dépend très fortement de la présence des sites archéologiques d’Angkor, a été violemment touchée par la crise liée au COV19. Seulement mille huit cents touristes ont visité Siem Reap en mai 2020, contre cent quarante mille en mai 2019. Plus de cent hôtels ont définitivement fermé leurs portes tandis que deux cent trente établissements ont suspendu leur activité sans date de reprise. Plus de huit mille travailleurs du secteur du tourisme ont perdu leur emploi. En se promenant dans les rues de Siem Reap, on découvre une Pub Street déserte, des rangées de restaurants aux grilles baissées et des bars désespérément vides. Les terrasses où il faisait bon vivre n’ont plus ni tables ni chaises, les petits marchands de souvenirs ont fermé boutique et des écriteaux « À vendre » ornent les façades du centre ville. Une ville qui n’est plus que l’ombre d’elle-même.
Face à cette situation sans précédent, une commission interministérielle regroupant le Ministre du Tourisme, celui de l’Environnement et celui de la Culture et des Beaux-Arts, ainsi que Monsieur Tea Seiha, Gouverneur de la province de Siem Reap, est en train d’établir un « Master Plan 2020-2035 » pour favoriser le retour des touristes. Différentes stratégies sont étudiées et ce qui en ressort s’appuie sur deux piliers incontournables, la Culture et la Nature. Ce Master Plan cherche à protéger l’héritage culturel exceptionnel et l’héritage naturel, dans le cadre d’un tourisme vert et durable. On visera à transformer un tourisme de masse en tourisme de qualité, en retenant davantage les visiteurs par des offres variées. Un axe majeur sera de développer les transports, fluviaux, routiers et aériens. L’élément écologique visera à améliorer l’image de Siem Reap, en en faisant une « Smart City », une ville propre au tourisme durable.
D’ores et déjà, la Apsara Authority a par exemple récemment demandé aux vendeurs situés sur le côté ouest du temple d’Angkor Vat de déplacer leurs étalages. Cette demande fait suite à un plan cherchant à améliorer les abords du site, pour mettre en valeur ce symbole de la culture khmère. Une quinzaine de propriétaires ont spontanément déplacé leurs commerces, comprenant que l’amélioration du site ne pourra qu’attirer davantage de touristes et donc de clients. Tous ces commerces devront avoir disparu à la mi-août au plus tard.
Dans le même esprit, Angkor Entreprise a ainsi créé des tickets longue durée pour la visite des temples d’Angkor. Un ticket valable un mois coûte cent dollars ; un ticket valable trois mois est proposé à cent cinquante dollars ; enfin, un ticket de six mois est disponible à deux cents dollars. De cette façon, les visiteurs intéressés peuvent découvrir Angkor et ses multiples temples sur une longue période, qui leur permettra de revenir à plusieurs reprises pour compléter leurs visites ou les approfondir. Cette démarche innovante est destinée aux détenteurs d’un visa de longue durée (trois mois minimum), et la création de votre carte, extrêmement simple, ne prendra que quelques minutes. Il vous faudra votre passeport et une photo (4×6 cm).
Cette initiative vise à encourager un tourisme de qualité. Que retenir d’Angkor, l’un des plus fabuleux sites archéologiques de la planète, en le visitant en quelques heures seulement ? Une visite au pas de course ne laissera que peu de souvenirs et en fin de compte une impression sans commune mesure avec la richesse et la profusion des lieux visités. Rappelons pour mémoire que le site d’Angkor à lui seul compte trente-huit monuments différents. Pour mémoire aussi, comparons-le avec la durée moyenne d’un séjour touristique à Siem Reap, qui était de deux jours en 2019. Un tourisme de qualité ne veut pas dire un tourisme plus cher. Il signifie un tourisme où l’on prend son temps, où l’on visite à pied ou à vélo, où l’on émaille la visite de temples de parcours en forêts comme la mangrove de Tek Chhub Khnar Pou que Monsieur Thong Khon, Ministre du Tourisme, a souhaité développer, dans la perspective d’en faire un site d’éco-tourisme.
Siem Reap a probablement tout à gagner à cette mutation et pourra ainsi transformer la catastrophe sanitaire en opportunité pour un futur qui, qu’on le veuille ou non, sera plus lent, plus mesuré, plus réfléchi. Sans aucun doute aussi plus responsable et plus durable.
Par Pierre Foratier – Lepetitjournal.com – 13 juillet 2020
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