Lan Ông, la rue de la médecine traditionnelle
Lan Ông est l’une des rares rues du Vieux quartier de Hanoï où le métier artisanal d’autrefois a été conservé avec plus de 70 établissements spécialisés en médecine traditionnelle et commerce des remèdes.
 Lorsque l’on se rend dans la rue Lan Ông, on est enivré par le parfum  des épices et des herbes médicinales que vendent les boutiques qui se  succèdent. La majorité de celles-ci sont aussi de petits cabinets de  consultation médicale où des praticiens vous tâtent le pouls et vous  prescrivent conseils et remèdes.
 
 Un métier transmis de père en fils
 
 Devant chaque boutique, les remèdes traditionnels, contenus dans des  sacs en papier ou en plastique, sont exposés ou suspendus. Dans le  magasin, ils sont disposés contre les murs ou rangés dans de solides  armoires dont chaque tiroir correspond à un ingrédient bien spécifique.
 
 Longue de 180 m, la rue Lan Ông est située dans le quartier de Hàng Bô,  arrondissement de Hoàn Kiêm. Elle fait partie du Vieux quartier de  Hanoï,  connu également sous le nom de quartier des « 36 rues et  corporations ».
 
 À la fin du XIXe siècle, sous la colonisation française, la  rue était nommée « rue de Fou-Kiên » ou rue des Phuc Kiên, car elle était  habitée par beaucoup de familles chinoises originaires de la province de  Fujian. Celles-ci s’adonnaient à la pratique de la médecine  traditionnelle et à la vente de plantes médicinales d’origine chinoise  réunies sous le vocable « thuôc Bac »(« médecine du Nord »).
 
 Plus tard, des habitants du village de Da Nguu, district de Van Giang,  province de Hung Yên (Nord), vinrent aussi vendre des médicaments  traditionnels, du Vietnam cette fois, appelés « thuôc nam » (« médecine du Sud »).
 
 Au fil du temps, Fou-Kiên est devenue une rue spécialisée dans les  médecines traditionnelles chinoise et vietnamienne. Les remèdes  comprennent herbes, racines, fleurs ou fruits soigneusement conservés  dans des tiroirs en bois. En 1949,  la rue Fou-Kiên a été renommée Lan  Ông. C’est le surnom de Lê Huu Trac (1720-1791), considéré comme  l’ancêtre de la médecine traditionnelle vietnamienne. 
 Après 1979, quand les familles chinoises repartirent en masse dans leur  pays d’origine, les habitants restants continuèrent cependant ce métier.  Selon Trân Thi Tuyêt Mai, cheffe de la Section de la pharmacopée  orientale de Lan Ông, la rue compte actuellement 65 foyers qui  pratiquent encore ce savoir-faire traditionnel. Les recettes de leurs  remèdes sont transmises de génération en génération. Bien  que ce métier  soit apparu dans cette rue au début du XXe siècle, plusieurs  familles le pratiquent depuis quatre à cinq générations, comme celle du  médecin Trân Kim Quang, au numéro 51. Avec ses 50 ans d’expérience, il  est l’un des cinq meilleurs médecins traditionnels de la rue.
 
 « Le commerce des remèdes traditionnels existe depuis tellement  longtemps dans cette rue que je ne me souviens pas de son origine. Je  suis la 5e génération à le pratiquer. Les savoir-faire et les expériences précieuses sont transmis de génération en génération », partage M. Quang.
 
 Hormis Trân Kim Quang, il y a d’autres praticiens comme Nguyên Kim Bang,  Nguyên Nhu Lê, Pho Duc Quang… dont le métier est héréditaire et qui  ont été formés au sein de la famille.
 
 Selon Mme Tuyêt Mai, à la fin de l’année 1980, Lan Ông était  considérée comme le centre national de commercialisation en gros de  médicaments traditionnels. « Actuellement, elle n’est plus animée  comme autrefois mais nous avons décidé de maintenir cette tradition  transmise par nos ancêtres », dit-elle.
 
 La médecine orientale garde toujours une place importante dans la vie de  la population bien que la médecine occidentale soit maintenant  dominante. « Depuis longtemps, j’utilise des médicaments à base de  plantes médicinales pour me maintenir en bonne santé. On peut  trouver  ici du ginseng, des champignons Linh Chi, des angéliques de Chine… Je  suis convaincue de l’efficacité   de ces remèdes », partage Nguyên Minh Hà, domiciliée dans l’arrondissement de Hoàn Kiêm.
 
 Une destination de choix des touristes 
 En plus d’être une rue où se perpétue un artisanat séculaire, Lan Ông  est aussi un lieu  pittoresque du Vieux quartier très apprécié des  visiteurs.
 
 « Nous restons seulement deux jours à Hanoï et nous avons décidé de  nous focaliser sur le Vieux quartier. Ma famille a voulu le parcourir à  pied pour mieux nous imprégner de la vie locale. Nous sommes très  étonnés par l’architecture ancienne de la rue Lan Ông. Et la fragrance  des herbes médicinales ajoute à cette ambiance hors du temps », confie Monica Nives, une touriste italienne. 
 
 Lan Ông  compte en effet encore beaucoup de belles maisons,  notamment  la salle de réunion de Phuc Kiên, un ouvrage des Chinois d’autrefois.  D’après Dô Van Khoa, président du Comité populaire du quartier de Hàng  Bô, afin de valoriser au mieux cette rue, notamment dans une optique   touristique conforme à l’orientation de l’arrondissement de Hoàn Kiêm et  de la ville, le quartier porte une attention paticulière à la  protection du paysage, de l’environnement ainsi qu’au maintien de la  sécurité.
 
 En outre, les autorités du quartier demandent aux commerçants de  toujours veiller à l’origine et à la qualité des remèdes qu’ils vendent.  « On peut affirmer que Lan Ông est très sûre pour les touristes, qui  peuvent s’y promener seuls ou en visite organisée », affirme M. Khoa.
 
 Pour sa part, Trân Thi Tuyêt Mai informe que lors des réunions du quartier, les foyers commerçants « sont appelés à être accueillants et à cultiver un mode de vie civilisé ».
 
 « La particularité de la rue Lan Ông, c’est que ses habitants  maintiennent toujours une belle déontologie commerciale. Bien que les  boutiques soient collées les unes aux autres, aucune querelle ou  activité de racolage des passants n’a jamais eu lieu », vante Mme Mai.
 
 À noter qu’en 2013, un projet de préservation et de restauration de la  rue a été mis en œuvre par le Comité populaire de l’arrondissement de  Hoàn Kiêm. D’une durée de deux ans, ce projet vise non seulement à  sauvegarder les bâtis anciens qui se font de plus en plus rares dans le  Vieux quartier, mais encore à mettre en valeur la médecine  traditionnelle. 
Par Huong Linh – Le Courrier du Vietnam – 22 février 2020
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