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Après le Covid-19. En Thaïlande, pour attirer les clients, les hôtels misent sur l’hygiène et le sur-mesure

Distance et hygiène irréprochable : voilà le credo des professionnels du tourisme thaïlandais, qui misent sur une nouvelle manière d’accueillir les voyageurs. Point d’orgue de cette stratégie : moins de contacts avec le personnel et entre les clients.

Au sanctuaire d’Erawan, situé au centre de la capitale thaïlandaise, Bangkok, à deux pas de mon bureau, les danseuses figurant depuis des dizaines d’années sur les photos des touristes sont de retour.

Elles portent toujours les mêmes coiffes pointues à clochettes dorées, mais leur visage est masqué et protégé par une visière en plastique.

Tout près de là, en vue de la réouverture, le personnel de l’hôtel Anantara Siam Bangkok se forme aux nouveaux protocoles de nettoyage des chambres, identiques à ceux utilisés dans les hôpitaux.

À la réception, des écrans en plexiglas sont installés sur le comptoir, les chaises et les tables sont soigneusement espacées, et de discrètes croix de couleur rouge sont collées sur le sol pour marquer les endroits où les clients doivent attendre pour être reçus à la réception.

Un paradis pour tous

La Thaïlande a été le premier pays après la Chine à signaler des cas de Covid-19 [le 13 janvier] et compte parmi les premiers à sortir du confinement. Bangkok est aussi la ville la plus visitée au monde, selon le Global Destination Cities Index de Mastercard. Elle accueille également des grands groupes hôteliers internationaux.

La reprise du tourisme en Thaïlande va donc permettre aux autres pays de voir ce qui les attend.

Avant le Covid-19, le tourisme était en plein essor ; c’était un paradis pour les visiteurs de toutes nationalités – Européens, Américains, Chinois, Indiens, ils adorent tous la Thaïlande, témoigne Srettha Thavisin, qui dirige les hôtels Sansiri et Standard. Quand tout cela sera fini, je pense que les gens seront heureux de revenir ici, peut-être en septembre, quand les vols internationaux auront repris normalement.”

Généraliser les technologies sans-contact

La Thaïlande a accueilli 39 millions de visiteurs l’année dernière, un nombre record, mais l’Autorité du tourisme de Thaïlande s’attend à ce que ce chiffre chute à 16 millions en 2020, tandis que de nombreux professionnels du secteur tablent plutôt sur 10 millions.

Les hôteliers et les restaurateurs insistent sur le fait que les touristes pourront à nouveau savourer les plaisirs du pays, avec quelques nouveautés.

La technologie sans contact (cartes de crédit, interrupteurs sans contact, voire la reconnaissance faciale) sera de plus en plus utilisée à la réception des hôtels, dans les ascenseurs et pour l’ouverture des portes et des poubelles.

Les espaces communs des hôtels seront reconfigurés ou redessinés afin d’offrir une meilleure ventilation et plus de luminosité.

Les buffets du petit-déjeuner seront pour la plupart remplacés par un service à table ; les serveurs vous souriront derrière leur masque et porteront des gants lorsqu’ils apporteront les som tam (salade de papaye épicée).

Limiter le nombre d’interaction humaine

Les amateurs de longs voyages privilégieront sans doute une villégiature dans un seul endroit, plutôt que de multiplier les sauts de puce en Thaïlande et dans le reste de l’Asie du Sud-Est.

Désormais, une hygiène et une propreté irréprochables ainsi que des contacts humains limités mais personnalisés feront partie intégrante de l’offre hôtelière, en particulier dans le haut de gamme.

“L’accueil sera toujours aussi personnalisé, mais nous réduirons au minimum le nombre de personnes en contact avec les clients, déclare Thomas Harlander, directeur général de l’hôtel de Bangkok du groupe hôtelier de luxe Rosewood. Le service sera plus fluide – moins de personnes, moins de points de contact”, précise-t-il.

Les serveurs à la porte de la chambre

Le groupe d’hôtellerie Anantara prévoit d’offrir un service de fitness individualisé, avec des équipements soigneusement nettoyés et des séances d’entraînement privées à réserver. Le room service sera encore assuré, mais les serveurs laisseront les chariots à l’entrée des chambres.

Personne ne veut voir une personne étrangère dans sa chambre”, estime Thomas Meier, vice-président du groupe pour l’Asie.

Avec environ 3 000 cas confirmés de Covid-19 et seulement 56 décès à ce jour [le 16 mai, date de publication de l’article], les autorités thaïlandaises ont progressivement assoupli le confinement depuis début mai.

Dans un premier temps, certains restaurants ont été autorisés à ouvrir à condition de laisser un espace suffisant entre les convives, puis des hôtels dans certaines provinces. Peu à peu, Bangkok, comme le reste de la Thaïlande, retrouve sa vie trépidante d’avant.

Pas de retour des touristes avant fin mai

Le paradoxe demeure. L’année dernière, si le nombre de visiteurs a atteint un pic historique, les plaintes concernant les plages bondées dans des endroits comme Phuket et Pattaya et les longues files d’attente dans les deux aéroports de Bangkok se sont multipliées.

L’Autorité du tourisme de Thaïlande, dont l’objectif se résume à attirer le maximum de visiteurs, a été critiquée pour cette gestion intenable.

Aujourd’hui, après deux mois de fermeture, les plages thaïlandaises n’ont jamais été aussi propres, et l’on revoit des animaux sauvages qui s’étaient faits rares : les calaos, les dauphins roses et les lamantins.

Le problème, pour les hôteliers comme pour les voyageurs, est qu’il n’est pas encore possible pour les touristes de se rendre dans la plupart de ces endroits.

Au 16 mai 2020, les déplacements intérieurs entre les provinces thaïlandaises restent limités, les restrictions variant d’une province à l’autre. La plupart des vols internationaux sont interdits jusqu’au 30 juin.

Les Chinois, les premiers à revenir ?

Les groupes hôteliers thaïlandais s’attendent à ce que le tourisme reprenne en trois étapes, en commençant par les Thaïlandais et les expatriés souhaitant voyager de nouveau.

Les autorités thaïlandaises envisagent également d’assouplir les mesures concernant les voyageurs étrangers, en commençant par les pays asiatiques comme la Chine et la Corée du Sud qui ont maîtrisé l’épidémie.

Les groupes hôteliers pensent que les Chinois, en particulier, libérés depuis peu du confinement, soient impatients de revenir.

S’ils veulent voyager, leur première destination sera sans doute la Thaïlande”, estime Suphajee Suthumpun, directrice de Dusit International.

La troisième et dernière phase de la réouverture sera celle des vols long-courriers en provenance des États-Unis et de l’Europe, une étape que les groupes hôteliers attendent pour la fin de l’année.

Des sites déserts

Si les hôtels résistent à l’envie de brader leurs séjours puisqu’ils sont confrontés à un taux d’occupation plus faible et à une augmentation des coûts liés à la santé et à la sécurité, ils ne ménagent pas leurs efforts pour faire revenir les touristes

À Ayutthaya, ancienne cité royale, un site classé au patrimoine mondial de l’Unesco, à quatre-vingt-dix minutes de route de Bangkok, l’hôtel Iudia n’a pas changé le prix de ses chambres mais propose des dîners gratuits, notamment parce que de nombreux restaurants restent fermés.

Seule une poignée de touristes thaïlandais déambule autour des places monumentales, des stupas et des temples de l’ancienne ville. Un site habituellement envahi par les touristes venus de Bangkok pour la journée. Cela ne changera probablement pas tant que les compagnies aériennes ne rétabliront pas davantage de vols long-courriers.

C’est une époque bénie… Vous avez les temples pour vous, lance Mayuree Tantayapong, la directrice de l’hôtel. Les gens qui étaient coincés chez eux et se sentaient seuls et isolés ont trouvé le temps long. Maintenant, ils veulent sortir et profiter de la vie.”

Par John Reed – The Financial Times via Courrier International – 5 juin 2020

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