Les barrages hydro-électriques, erreurs stratégiques ou atouts énergétiques ?
Les barrages sont des infrastructures construites pour contrôler le débit des rivières et stocker de grandes quantités d’eau dans des lacs ou des réservoirs artificiels.
Ils sont utilisés non seulement pour l’approvisionnement en eau des exploitations agricoles et la lutte contre les inondations, mais aussi pour produire de l’électricité. Or l’Asie du Sud-Est, avec le puissant Mékong, l’Irrawaddy en Birmanie et le fleuve Chao Phraya en Thaïlande offre un bassin fluvial prometteur pour l’industrie hydroélectrique.
Tous ces fleuves sont loin des grandes villes comme Kuala Lumpur ou Singapour, où la demande d’électricité est élevée. Mais leur exploitation, grâce à la construction de barrages, est très rentable. Premièrement, l’avantage concurrentiel de l’hydroélectricité par rapport aux combustibles fossiles est que son empreinte carbone est faible, presque nulle. Cela signifie que l’hydroélectricité pourrait nous aider à remplacer, au moins partiellement, le gaz, le charbon et le pétrole, dont dépendent de nombreux pays.
Grande quantité d’électricité
De plus, les barrages durent des décennies et ont des coûts d’exploitation plus faibles, puisque l’eau, source d’énergie, est gratuite. Et, là où de grands fleuves rencontrent des gorges abruptes, une grande quantité d’électricité est produite.
Par exemple, le Laos possède des dizaines de centrales hydroélectriques, avec une capacité totale installée d’environ 7 GW. Cela représente environ la moitié de la capacité totale de production d’électricité de Singapour.
Mais pour que ces avantages se concrétisent, il faut pouvoir transmettre l’hydroélectricité des grands fleuves vers les grandes villes. Un tel service peut être fourni par le réseau électrique de l’ASEAN (Association des nations de l’Asie du Sud-Est), une grande infrastructure conçue pour interconnecter tous les pays de l’ASEAN. Ce réseau électrique, dont la création remonte aux années 1990, est encore en cours de réalisation.
Accord énergétique avec la Malaisie et Singapour
Par exemple, la Malaisie a signé un accord énergétique tripartite avec la Thaïlande et le Laos, selon lequel la Malaisie achètera de l’hydroélectricité au Laos via la Thaïlande.
Singapour a récemment annoncé qu’elle prévoyait d’importer de l’électricité de Malaisie, en commençant par un essai de deux ans. La ville-Etat fera également partie d’un projet d’intégration énergétique avec le Laos, la Thaïlande et la Malaisie. Ce projet d’intégration électrique est connu comme un « pionnier » du réseau électrique plus large de l’ANASE.
Comme les grandes batteries ne sont pas encore rentables, les compagnies d’électricité utilisent les barrages pour stocker l’eau et, par conséquent, l’électricité. En d’autres termes, les services publics peuvent diminuer la production d’hydroélectricité lorsque le soleil brille ou lorsque le vent souffle, puis l’augmenter si nécessaire. En intégrant toutes ces ressources, nous disposons d’une voie pour réduire l’empreinte carbone du secteur de l’électricité.
Le problème des barrages est que l’envers du décor est terrible
Les barrages ont en effet aussi un impact négatif sur l’environnement. Ils déconnectent des segments de rivière, limitant, et parfois arrêtant, le flux de sédiments et de nutriments, qui constituent l’élément vital des rivières. Ils entravent également la migration des poissons et modifient les régimes hydrologiques naturels.
Dans certains cas, les réservoirs d’eau inondent en permanence de vastes zones qui abritent des points chauds de biodiversité et des communautés autochtones.
En d’autres termes, il y a un prix caché que l’environnement et la société paient pour l’hydroélectricité. Il n’est donc pas surprenant que de nombreuses organisations s’opposent à la construction de nouveaux barrages.
Barrage de Xayaburi
Un exemple clair est donné par le barrage de Xayaburi, un projet hydroélectrique de 1,4 GW récemment achevé dans le nord du Laos avec la participation du groupe français EDF.
Ce n’est pas seulement sa taille qui a suscité des inquiétudes, mais aussi le fait qu’il s’agit du premier barrage construit par le Laos sur le Mékong. Cela signifie que le barrage a un impact plus profond sur l’écosystème du fleuve et ses pêcheries.
La construction d’autres barrages sur le fleuve causerait donc des dommages irréparables au fleuve et aux systèmes socio-économiques qu’il soutient.
Gavroche-thailande.com – 15 Novembre 2020
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